Emmanuel Macron appelle au « réarmement civil et moral » de la jeunesse alors que la France s’est engagée dans une «économie de guerre », augmentant considérablement ses dépenses pour l’armée. Ce ne sont pas les seuls symptômes d’un inquiétant tournant. Alain Refalo analyse les ressorts de cette militarisation et explique comment y résister.
Au mois de juillet dernier, le Parlement adoptait la loi de programmation militaire 2024-2030, pour un montant de 413 milliards d’euros. Elle consacrait une hausse du budget militaire de 3 milliards d’euros par an jusqu’en 2027, puis de 4,3 milliards d’euros jusqu’en 2030, ce qui portera le budget de la défense nationale à 69 milliards d’euros en 2030, alors qu’il était de 32 milliards en 2017. Il est clairement affirmé dans cette loi de programmation militaire que la France s’engage désormais dans une « économie de guerre » afin d’augmenter significativement la production d’armement, pour le plus grand bonheur du complexe militaro-industriel. C’était le premier signal attestant que la France se préparait à la guerre.
Les dernières déclarations du Président de la République s’inscrivent dans la continuité de ce qu’il faut bien nommer la militarisation croissante du pays. En appelant au « réarmement civique et moral » de la jeunesse, après avoir au mois d’août annoncé sa volonté de la « re-civiliser » (après les émeutes), Macron-Jupiter veut aller encore plus loin dans son embrigadement idéologique afin de la préparer au climat de guerre qu’il cherche à imposer à la nation. La jeunesse, future chair à canon disponible, doit être prête, préparée, par l’école, par le SNU et sans doute bientôt par le service militaire qui effectue un retour en grâce chez de nombreux politiques et militaires.
Tous les discours officiels convergent en effet pour préparer la population française à l’idée que la « paix » est sans doute derrière nous ; ce qui signifie que, forcément, la guerre est devant nous. La guerre en Ukraine, le conflit israélo-palestinien, à la suite des attentats islamistes, sont désormais utilisés à des fins de propagande militariste. La perspective d’un conflit majeur sur notre sol ou/et d’une guerre en Europe dont la France serait partie prenante incitent le pouvoir politique à anticiper cette échéance. Pour que cette guerre soit acceptée par la population, il faut que les esprits soient prêts et qu’ils la considèrent comme une échéance inéluctable.
Tout ce qui peut contrarier cet objectif est réprimé. Depuis plusieurs années, le pouvoir lepénisé cherche à contenir et à vaincre les résistances civiques, sociales, écologiques qui se développent contre les inégalités et les discriminations, contre le dérèglement climatique, contre les lois iniques comme la loi immigration. Pour atteindre cet objectif, et justifier des mesures ultra-sécuritaires et militaristes, il agite des chiffons rouges qui détournent l’attention et il instiller de la peur. Parce que l’ennemi pour l’État, de tout temps, avant d’être extérieur, est d’abord intérieur. C’est pourquoi les libertés sont aujourd’hui attaquées, que le droit de manifester, de s’exprimer, de contester est réprimé, souvent avec une brutalité inouïe par une police largement gangrenée par les idées de l’extrême droite. Il s’agit de faire taire les voix dissidentes qui font obstacle à l’édification d’une pseudo unité nationale autour de son chef qui trouve dans la perspective d’une guerre à venir un moyen de sauver son deuxième quinquennat.
Pour tenter de mâter la jeunesse et de la remettre dans « le droit chemin », Macron a sorti de son chapeau en 2017 le Service National Universel (SNU). Dans une vision très paternaliste de la jeunesse, le SNU, dans son principe comme dans ses méthodes, ainsi que l’ont montré les phases test, n’est qu’une école de la soumission inconditionnelle à l’autorité, tout particulièrement à l’autorité militaire. Il s’agit d’inculquer à la jeunesse les valeurs et les méthodes militaires, mais aussi de lui faire accepter « les enjeux de la défense et de la sécurité nationale ». Le « réarmement civique et moral » de la jeunesse voulu par Macron trouve déjà dans le SNU un terrain d’application édifiant : garde à vous, lever du drapeau, Marseillaise, uniforme, discipline stricte, encadrement militaire, participation aux cérémonies militaires…
Lorsqu’il était secrétaire d’État en charge de la jeunesse, Gabriel Attal, avait annoncé la généralisation du Service national universel à tous les jeunes de 16 ans dès 2024. Cette idée n’a pas été abandonnée. Le 5 janvier dernier, Prisca Thevenot, secrétaire d’État à la jeunesse et au Service national universel, a fait savoir qu’elle souhaitait également sa généralisation afin qu’il « devienne un passage républicain pour chaque jeune de notre nation ». Le SNU obligatoire pour chaque génération sera d’ailleurs l’aboutissement d’un processus d’endoctrinement commencé dès l’école primaire (éducation civique et morale) et prolongé tout au long du secondaire avec les fameux « parcours citoyens ».
Les enseignants doivent se faire le relais de la propagande militaire au sein de leurs classes, ce qui implique aussi de mettre en valeur le rôle de l’armée dans les interventions militaires extérieures.
Dans ces « parcours », bien balisés dans les programmes, l’éducation à la défense nationale, aux valeurs patriotiques, au respect de l’armée et de ses missions, tient déjà une place non négligeable. Il n’est pas inutile de rappeler que le dernier protocole Défense – Éducation nationale, de juin 2016, valorise à l’école la place de l’armée dans la vie de la nation. Il est y écrit que « l‘enseignement de défense vise à améliorer la connaissance des missions des militaires et de la Défense par les élèves les plus jeunes. Il vise à leur faire comprendre que les militaires servent la Nation ». Autrement dit, les enseignants doivent se faire le relais de la propagande militaire au sein de leurs classes, ce qui implique aussi de mettre en valeur le rôle de l’armée dans les interventions militaires extérieures. On se saurait dévoyer davantage la mission émancipatrice de l’école et des enseignants que de la mettre au service d’une institution qui incarne des valeurs aussi contraires à celles de l’éducation.
Mais cela ne suffit encore pas. Gabriel Attal, lors de son passage éclair à l’Éducation nationale, a annoncé, au mois de décembre dernier, l’expérimentation du port de l’uniforme à l’école, au collège et au lycée dans les collectivités locales volontaires. Outre le caractère rétrograde de cette mesure anti-éducative, elle flatte les relents autoritaristes dominants. Uniforme à l’école, uniforme pendant le SNU, l’uniforme devient un autre symbole de cette volonté de mettre la France au garde à vous, de gommer les différences et de marcher au pas.
Ainsi, tout converge pour davantage caporaliser, uniformiser et endoctriner la jeunesse.Il est fort probable, au rythme où vont les annonces militaristes, que dans les mois à venir la question du service militaire redevienne d’actualité. Déjà, le 5 novembre dernier, l’ancien premier ministre Edouard Philippe s’interrogeait sur un retour prochain du service militaire en France. « Est-ce qu’un jour, indique-t-il, pour préserver les intérêts de la France, sa sécurité, il ne faudra pas former – et former militairement, sinon ça n’a aucun sens – une partie de la jeunesse, voire toute la jeunesse, c’est une question qui sera peut-être posée ? » Il ajoutait que « comme nous vivons dans un monde dangereux, j’ai tendance à penser qu’elle sera posée bientôt». Il y a fort à parier que le retour du service militaire sera à l’ordre du jour de la prochaine présidentielle, à moins que les événements s’accélèrent. Car certains aimeraient aller plus vite.
La Peur, arme politique
15,00 €Ainsi, dans une récente tribune au Figaro, l’ancien numéro deux de l’armée de terre, le général Bertrand de la Chesnais (et par ailleurs directeur de la campagne présidentielle d’Eric Zemmour) plaide pour la mise en place d’un « véritable service national opérationnel obligatoire pour l’ensemble d’une classe d’âge ». Par opérationnel, il entend « pour efficacité immédiate » au sein des armées. « A l’issue de son service, écrit-il, le contingent serait automatiquement affecté dans la Garde nationale pour une durée active de 5 ans, afin de servir comme réserviste rappelable 2 semaines par an quel que soit son emploi ». Pour ne pas être en reste, il souhaite « une grande politique de réarmement moral, militaire et civique » afin de « préparer sans tabou la guerre de demain »… Les mêmes mots que ceux de Macron quelques semaines plus tard…
Le réarmement moral et civique, expression empruntée à l’extrême droite, voulu par le président de la République, tout comme la généralisation du Service National Universel obligatoire, s’inscrivent dans un contexte de militarisation croissante de notre pays. Dans notre ouvrage Démilitariser la France (Chronique Sociale, 2022), nous avons montré toutes les facettes de cette militarisation et montré en quoi la France est l’un des pays les plus militarisés au monde : elle cumule de puissants symboles militaristes (histoire et mémoire guerrières, défilé militaire du 14 juillet, hymne national guerrier), une politique de défense coûteuse (dissuasion nucléaire), une industrie de défense qui alimente un important commerce des armes, de nombreuses interventions militaires extérieures, une militarisation croissante de la société (accords Défense-Education, SNU, armements des forces de l’ordre.) La France dite républicaine, par ses choix militaristes, a tourné le dos depuis longtemps aux valeurs affichées sur les frontons de nos mairies : Liberté, Égalité, Fraternité.
Un vent mauvais souffle dans ce pays. Un climat de guerre, peut-être de guerre civile, s’installe progressivement. Certains l’évoquent déjà et s’y préparent. C’est pourquoi les mobilisations à venir seront capitales. D’abord, pour faire abroger la loi immigration aux relents racistes et xénophobes ; ensuite, pour lutter massivement contre l’inaction climatique de ce gouvernement et imposer une véritable transition écologique ; puis pour résister à toutes les atteintes à notre modèle social désossé jusqu’à la moelle ; enfin, pour construire et porter une véritable alternative sociale et écologique qui offre enfin une espérance pour 2027.
La politique lepéno-macroniste peut se résumer en deux mots : se résigner et obéir.
Mais à tous ces combats, il faut ajouter désormais la lutte contre la militarisation de notre société.Il est temps que se lève un véritable mouvement en faveur de la paix, pour le désarmement nucléaire de la France, pour une autre politique de défense, pour une démilitarisation des forces de l’ordre. La dernière grande victoire contre le militarisme, dans ce pays, remonte à la lutte des paysans du Larzac contre l’extension du camp militaire. Depuis, notre pays est à la traîne des grands courants européens pour la paix, le désarmement et la non-violence.
Et dans ce climat militariste et guerrier, nous devons, plus que jamais, défendre et promouvoir l’objection de conscience. L’objection de conscience au SNU, au service militaire, à toute propagande militariste, à tout commerce des armes, à tout préparatif de guerre. Avec la disparition du service militaire obligatoire en 1997, les lois sur l’objection de conscience ont été suspendues. Elles permettaient à tout jeune qui en faisait la demande écrite d’effectuer un service civil alternatif de deux ans (au lieu d’un an pour le service militaire) dans une association de son choix. Certes, la durée du service civil était discriminatoire, mais la loi permettait de refuser « légalement » d’apprendre à utiliser des armes de guerre, d’apprendre à tuer, pour des motifs personnels ou autres, tout en effectuant une activité associative choisie. L’objection de conscience à la guerre et à ses préparatifs devient un impératif moral, non seulement pour ne pas être complice soi-même du mal que nous dénonçons, mais pour enrayer directement la machine à fabriquer du malheur sur cette terre.
La politique lepéno-macroniste peut se résumer en deux mots : se résigner et obéir. Se résigner à la fatalité de la guerre qui vient, obéir aux autorités et aux ordres, sans discuter. Nous y opposerons ce qui a toujours fait le sel de la vie : résister et désobéir. Résister aux lois scélérates qui déroulent le tapis rouge à l’extrême droite, résister à la liquidation de notre modèle social, résister à l’inaction climatique de ce pouvoir, résister à la militarisation de notre société. Désobéir enfin, car viendra un temps où les citoyens n’auront pas d’autre choix que d’entrer en dissidence civique pour préserver les valeurs essentielles qui fondent notre vivre ensemble.
Alain Refalo Militant de la non-violence et de l’écologie depuis 35 ans, cofondateur du Centre de ressources sur la non-violence de Midi-Pyrénées (en 2003). Professeur des écoles depuis 1990, Initiateur, en octobre 2008, du mouvement des enseignants-désobéisseurs du primaire pour résister aux attaques portées contre l’école de la République.
Source: Le blog d’Alain Refalo
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Michel Regnier
En tant qu’objecteur de conscience et donc bien sûr, indécrottable pacifiste de longue date, j’ai enfin pris conscience du fait que j’étais juste un minable TERRORISTE…
Cela notamment grâce aux leçons magistrales du sage Darius Rochebin et ses experts autorisés, tous spécialistes en expertises spécialisées, factuelles, neutres, impartiales et indépendantes de toute influence néfaste. A l’instar de Pascal Praud, Nathalie Saint-Cricq, David Pujadas et consorts entre beaucoup d’autres, que je remercie tous chaudement pour leurs analyses politiques salvatrices et rédemptrices. Ils m’ont écarquillé les yeux sur mes précédentes convictions retorses, honteuses, lâches et indiscutablement erronées à tous points de vue ; un grand merci également à ces chaînes TV de pédagogie éducative, dont CNews, BFM, LCI, i24News et leurs respectables consœurs.
Car à présent et pour pendable que je suis, je me repens tout pantois, en battant ma modeste coulpe face aux monstrueuses « valeurs » qu’auparavant je défendais bec et ongles ; déjà, le temps qu’il m’a fallu pour comprendre et admettre que tout d’abord, la paix n’est absolument ni rentable ni désirable, bien au contraire. Des années durant j’ai dénigré et calomnié les valeureux équipementiers que sont par exemple la FN Herstal, Safran, Thalès, Dassault etc. etc., ces admirables entreprises qui font vivre des millions de travailleurs courageux, tous acquis à la Sainte-Cause. L’énergie vaine que j’ai dépensé à vilipender et conspuer les armes à feu que j’exécrais, alors que maintenant je les perçois comme essentielles, indispensables et ultra polyvalentes ; d’ailleurs, je suis prêt à inciter les autorités à rendre leur détention obligatoire, c’est dire si j’ai changé d’avis ! Depuis peu j’en fais aussi collection, et celle-ci s’enrichit de jour en jour… Tandis que je ne sors plus jamais sans un revolver en poche, il va de soi que mon passe-temps favori est à présent le stand de tir, où je me perfectionne en m’entraînant quasi quotidiennement.
Naguère j’abhorrais l’armée, les soldats et la discipline militaire que pourtant je n’ai jamais expérimenté, alors que maintenant je regrette d’être retraité, ce qui hélas ne me permet plus de m’engager dans la Défense active de ma chère Patrie voire de tout l’Occident.
Ah comme je m’en veux d’avoir été si longtemps aveuglé, à quel point je suis jaloux des militaires de carrière, et des fusils d’assaut dernier cri dont ils disposent pour neutraliser leurs cruels adversaires. J’imagine si bien le sentiment de puissance que l’on doit ressentir aux commandes d’une tourelle de char, comme ça doit être excitant de distribuer sans compter des chapelets d’obus sur les troupes ennemies, aussi sauvages que méprisables. Ou alors le bonheur qu’on doit ressentir en larguant depuis un chasseur supersonique, des bombes cataclysmiques sur les zones densément peuplées des contrées adverses. Sans oublier la fort probable jouissance qu’on doit ressentir face à toutes les souffrances punitives légitimement infligées aux violents « rebelliqueux » et « untermenschen » sanguinaires ni vergogne, eux qui décidément ne méritent que cela…
MAIS COMMENT DIABLE AI-JE PU ME MÉPRENDRE À CE POINT ET PENDANT TANT D’ANNÉES, DURANT LESQUELLES JE FUS AINSI LE PIGEON NAÏF DE LA FALLACIEUSE « COLOMBE DE LA PAIX » ? J’aimerais tellement pouvoir me racheter, notamment par rapport à l’OTAN que j’ai détesté et diffamé si injustement, sans m’apercevoir qu’il s’agit en fait d’une organisation caritative, humanitaire et bienveillante : évidemment j’implore humblement son pardon, tandis que je n’évoque plus ce « Saint Axe du Bien » qu’en termes foncièrement élogieux.
Enfin, j’adresse toute ma gratitude aux chers Joe, Ursula, Emmanuel, Olaf, Benyamin, Volodymyr et Vladimir pour ne citer qu’eux parmi tant d’autres, qui ont vaillamment décidé l’avènement prochain de WW3, potentiellement « fongique », en guise d’ultime rédemption. À présent moi aussi je l’attends de mes vœux pieux, puisqu’il n’y a pas d’alternative à cette seule et unique solution réaliste, permettant d’instaurer la Démocratie absolue partout où elle s’impose, et Dieu sait si…
Michel REGNIER
(PS : tout à prendre au contre-pied, évidemment !)