11/18/2023 Tehran, Iran. Unidentified men wearing masks and military uniforms wave Iranian, Palestinian, Iraqi, Lebanese, Syrian, Hezbollah, Fatemiyoun Brigade, and Hashd Shabi (PMF) flags during a pro-Palestine rally on November 18, 2023, in Tehran, Iran. Thousands of Iranian people wave flags reading "You're dealing with us" during a rally in solidarity with Palestinian children in Enghelab (Revolution) Square in Tehran. (Photo by Hossein Beris / Middle East Images / Middle East Images via AFP)AFP

La « trêve » de Gaza ne va pas stopper la guerre régionale

La guerre régionale est là. L’Axe de la Résistance estime que les États-Unis et Israël veulent prolonger la guerre de Gaza indéfiniment. Si bien qu’une escalade régionale leur paraît inévitable désormais. Explications.

L’armée israélienne a annoncé l’extension de ses opérations terrestres dans le nord de la bande de Gaza. Après s’être emparé de territoires situés sur le littoral, dans la partie nord-ouest de la bande, Tel-Aviv entame à présent une véritable opération terrestre.

Pendant plus de trois semaines, l’armée d’occupation a opéré dans des zones proches du littoral, des zones où il est impossible de creuser des tunnels et, par conséquent, des zones où la résistance palestinienne n’a pas de capacités défensives significatives.

Mais aujourd’hui, l’armée d’occupation se déplace vers l’est de la côte de Gaza, ce qui permet à la résistance armée de manœuvrer beaucoup plus facilement et d’infliger des pertes plus importantes aux soldats envahisseurs et à leurs véhicules blindés – cela s’est d’ailleurs vu ces derniers jours.

En bref, la bataille terrestre dans le nord de la bande de Gaza ne fait que commencer et devrait devenir encore plus tendue dans les semaines à venir.

L’escalade régionale

En soutien à la résistance de Gaza, l’armée yéménite et les combattants d’Ansarallah se sont emparés d’un cargo appartenant à un Israélien au large de la mer Rouge, le 19 novembre. Ils ont menacé de prendre pour cible tous les navires israéliens traversant le détroit de Bab al-Mandab.

Au cours de la semaine écoulée, à la frontière entre le Liban et Israël, le Hezbollah a augmenté la fréquence de ses opérations militaires. Le 20 novembre, l’armée d’occupation a enregistré plus de 40 attaques contre ses positions. L’une de ces attaques a été menée avec quatre roquettes, chacune dotée d’une ogive explosive pesant environ 500 kilogrammes. La salve a détruit la caserne militaire israélienne de Branit, près de la frontière avec le Liban. Au cours des trois derniers jours, le Hezbollah a mené en moyenne 12 opérations militaires par jour contre des cibles israéliennes.

Parallèlement, la résistance irakienne poursuit ses attaques contre les bases militaires US en Irak et en Syrie – plus de soixante opérations à ce jour.

Toutefois, les nombreux alliés occidentaux de Tel-Aviv ignorent largement cette accélération des affrontements en Asie de l’Ouest. Leur attention est détournée par les pourparlers en cours sur l’échange de prisonniers entre Israël et la résistance palestinienne, sous la médiation du Qatar et des États-Unis. Ces négociations durent depuis des semaines, elles sont considérées comme le signe d’une désescalade à venir en Palestine.

Ces spéculations sont alimentées par une fuite selon laquelle le gouvernement israélien envisagerait la démobilisation imminente d’un certain nombre de réservistes de l’armée. Même si Tsahal peut effectivement démobiliser une partie des forces de réserves appelées après l’attaque du 7 octobre, cette décision ne serait pas un signe évident de désescalade. En effet, les quelque 300 000 réservistes mobilisés étaient bien trop nombreux pour l’armée d’occupation qui n’a pas été en mesure d’absorber ce personnel sur les fronts de Gaza, du Liban et de la Cisjordanie.

Cependant, nombreux sont ceux qui s’accrochent avec optimisme à l’hypothèse d’une désescalade. Ils sont en outre encouragés par les déclarations officielles des États-Unis qui critiquent – de manière édulcorée – le fait qu’Israël prenne pour cible des civils palestiniens. Ces déclarations officielles soulignent également les divergences ponctuelles entre les États-Unis et Israël sur ce qu’ils appellent la “phase post-Hamas” à Gaza. Ce serait une preuve supplémentaire que Tev-Aviv sera amené à ralentir sa guerre.

Mais au stade actuel du conflit, ces divergences et ces observations sont considérées comme totalement hors de propos par les responsables de l’axe de résistance dans la région. Ils constatent au contraire que Washington maintient le flux des livraisons d’armes à Israël depuis le début de la guerre, tout en refusant obstinément d’envisager un cessez-le-feu permanent.

De plus, les États-Unis n’ont réduit ni leur niveau d’implication dans la gestion des opérations militaires dans la bande de Gaza ni leur renforcement des systèmes de défense antimissile pour contrer d’éventuelles attaques de roquettes yéménites ou irakiennes sur les positions israéliennes.

Les responsables de l’Axe estiment que les déclarations conciliantes des États-Unis, qui laissent parfois entendre qu’une phase de désescalade est imminente, ne sont rien d’autre qu’une “opération de relations publiques” étasunienne visant à réparer une image fortement endommagée par leur soutien inconditionnel au massacre continu des Palestiniens de Gaza par Israël.

En changeant légèrement de ton, Washington cherche également à induire en erreur l’axe de la résistance, espérant ainsi éviter une augmentation des tensions et des affrontements dans la région.

De la “trêve” à la guerre régionale

Les négociations actuelles sur l’échange de prisonniers entre Israël et la résistance palestinienne prévoient une trêve “humanitaire” de cinq jours. Il ne s’agit en aucun cas d’un cessez-le-feu ni d’une occasion d’obtenir une nouvelle accalmie de la violence. Ceux qui connaissent la réalité du terrain dans la bande de Gaza confirment que toute trêve ne sera qu’une occasion pour les deux parties de réorganiser leurs rangs en vue de l’intensification des combats dans les semaines à venir.

Ces observations sont fondées sur le fait qu’Israël continue d’adhérer à ses objectifs militaires initiaux, modifiés par rapport au plan d’occupation de l’ensemble de la bande de Gaza. Les objectifs de Tel-Aviv sont aujourd’hui d’occuper tout le nord de Gaza ; deuxièmement, de déplacer tous ses habitants, dont plus de 800 000 vivent encore sous le siège et les bombardements.

Et troisièmement, poursuivre le siège du sud de la bande en exerçant une pression militaire par des frappes aériennes intensives et des opérations spéciales, l’objectif étant de forcer le Hamas et les autres factions de la résistance palestinienne à se rendre.

Ce plan est pleinement soutenu par les États-Unis et leurs alliés occidentaux, ainsi que par les États arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël, notamment ceux qui sont les plus éloignés des frontières palestiniennes.

À la lumière de ces réalités, l’axe de la résistance poursuit sa propre escalade en Asie occidentale afin de changer les rapports de force et d’amener ses adversaires à réduire l’intensité du conflit. Cette semaine, la pression a été considérablement accrue lorsque des combattants yéménites d’Ansarallah ont capturé un navire lié à Israël dans les voies navigables de la région.

C’est un désastre pour Tel-Aviv, qui dépend principalement du transport maritime pour ses importations et ses exportations. Si cette situation se répète, les navires liés à Israël ne seront plus assurables et il sera impossible d’embaucher des équipages. C’est également un scénario cauchemardesque pour Washington, qui souhaite la poursuite de la guerre de Gaza alors que ses positions dans la région jouissent d’un calme complet.

En effet, les États-Unis cherchent désespérément à maintenir une paix régionale, surtout en Irak. Alors que la résistance irakienne multifactionnelle cible les bases d’occupation US à l’intérieur de leur pays et en Syrie, la réponse étasunienne a été modérée jusqu’ici. Les forces militaires US ont limité leurs frappes de représailles au territoire syrien – et seulement après avoir informé leurs homologues russes. 

Jusqu’à présent, Washington a évité de riposter sur le territoire irakien pour ne pas nuire à ses considérables intérêts dans le pays – intérêts commerciaux, militaires et politiques. De plus, Washington ne veut pas inciter la résistance irakienne à étendre ses opérations contre les bases US dans d’autres États d’Asie occidentale.

Pas de cessez-le-feu en vue

Selon l’évaluation actuelle de la guerre à Gaza par l’axe de la résistance, les États-Unis et Israël recherchent un conflit prolongé – peut-être même une guerre sans fin qui transformerait la bande de Gaza en un champ de bataille permanent pour s’assurer qu’Israël ne soit plus confronté aux capacités de dissuasion palestiniennes.

D’autre part, l’Axe continue de rechercher tous les moyens – y compris militaires – de faire avancer aussi vite que possible un cessez-le-feu. L’annonce de la « trêve » actuelle n’est pas tombée de nulle part. Elle fait suite aux coups douloureux portés contre les forces d’occupation à Gaza, à la forte escalade des affrontements en Cisjordanie occupée et à l’augmentation progressive du rythme et de la gravité des attaques dans la région.

La trêve sur l’échange de prisonniers peut être annoncée à tout moment. Elle ne mettra cependant pas fin à la guerre. La trêve n’est qu’une pause permettant aux belligérants de se préparer à des combats plus violents, qui ne se limiteront pas à Gaza ni à la frontière libano-palestinienne.

En cette fin d’année 2023, toute l’Asie occidentale est vouée à davantage de tensions, à plus de batailles et à de multiples rebondissements. La seule solution pour éviter un tel scénario ? Annoncer un cessez-le-feu à Gaza et apporter fournitures ainsi que produits de première nécessité à sa population blessée. Seul Washington y fait obstacle, bloquant fermement et systématiquement toute idée d’un cessez-le-feu dès que l’occasion se présente.


Source originale: The Cradle
Traduit de l’anglais par GL pour Investig’Action

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