Bolivian former President (2006-2019) Evo Morales Ayma (C) waves as he takes part in the so-called ‘March to Save Bolivia’ -against his former ally, leftist leader Luis Arce- in Ayo Ayo, Bolivia, on September 21, 2024. The march of around 4,000 people is a protest against Arce's government, which they accuse of using the Judicial and Electoral powers to block Morales' candidacy for the August 2025 elections and in response to the economic crisis, evident in the shortage of dollars and fuel. (Photo by AIZAR RALDES / AFP)AFP

Tentative d’assassinat sur Evo Morales dans un climat tendu en Bolivie

Dimanche, Evo Morales a déclaré avoir fait l’objet d’une tentative d’assassinat. Cet événement survient dans un contexte politique tendu. L’ancien président bolivien et ses partisans bloquent les routes en Bolivie pour protester contre la politique de Luis Arce.

Le dimanche 27 octobre, des tireurs auraient criblé de 14 balles le véhicule d’Evo Morales alors qu’il était en déplacement. L’ancien président bolivien a publié une vidéo sur Facebook avec le commentaire suivant : « Une tentative d’assassinat s’est produite ce matin (…) dans la municipalité de Shinahota. (…) Nous avons croisé deux véhicules d’où sont sortis quatre hommes cagoulés, armes à la main, qui ont commencé à tirer. »

Evo Morales a construit son leadership avec le soutien des masses parmi les paysans, les ouvriers et les mineurs. Sa longue trajectoire dans la lutte sociale et sa courageuse présidence ont permis la refondation de l’État bolivien.

Evo Morales a par ailleurs subi déjà plusieurs tentatives d’assassinat. Notamment en 2009, lorsque l’extrême droite avait recruté des mercenaires croates et hongrois pour liquider le président qui avait pu déjouer la conspiration. En 2019, le coup d’État militaire soutenu par la même extrême droite avait également essayé d’assassiner Evo Morales.

Un pays en crise

Mais le contexte politique des événements survenus dimanche est différent. Evo Morales accuse le président actuel. Luis Arce a été son ministre de l’Économie de 2006 à 2019. S’il l’a soutenu pour remporter la présidence, Morales l’accuse aujourd’hui de trahir le projet politique du Mouvement au Socialisme (MAS), parti fondé par Morales lui-même et les puissants mouvements des paysans, des ouvriers et des femmes prolétariennes de Bolivie.

D’ailleurs, depuis deux semaines, Evo Morales et ses soutiens bloquent les routes du pays pour protester contre la politique du gouvernement. De son côté, Luis Arce rejette les accusations de tentative d’assassinat et dénonce les actions d’Evo Morales qui « déstabilisent le pays » et « entravent l’approvisionnement en nourriture et en carburant ». Luis Arce l’accuse de vouloir « interrompre l’ordre démocratique ».

Evo Morales jouit toujours d’une énorme popularité en Bolivie. À l’inverse, Luis Arce est vivement critiqué alors que le pays s’enfonce dans une crise économique en raison notamment de la baisse de production de gaz et d’une inflation provoquée par l’épuisement des devises étrangères.

Prestigieux intellectuel marxiste, ancien vice-président d’Evo Morales, Alvaro Garcia Linera critique lui aussi le gouvernement d’Arce. Il le presse de prendre les mesures nécessaires pour redresser l’économie. Alvaro Garcia Linera préconise notamment un contrôle du commerce extérieur sur une période temporaire avec l’obligation pour les exportateurs de déposer leurs dollars auprès de la Banque centrale. Ou encore une réforme fiscale progressive qui taxerait davantage les plus grandes fortunes. Aussi l’achat d’or auprès des coopératives d’Amazonie et du nord de La Paz qui ne pèsent pas assez aujourd’hui. Ou même une refonte de l’exploitation du lithium dans laquelle l’État pourrait s’associer à des entreprises internationales.  

Maintenir le cap

L’Amérique latine a été le théâtre de plusieurs trahisons au sein de la gauche ces dernières années. En Équateur par exemple, le président Moreno a tourné le dos à Rafael Correa pour s’aligner sur Washington et mener des politiques néolibérales. Au Pérou, Pedro Castillo a été renversé et emprisonné pour être remplacé par son ancienne ministre du Développement, Dina Boluarte, désormais alliée à la droite.

Luis Arce n’a pas suivi le même chemin. Il maintient la Bolivie au sein de l’ALBA, bloc de pays progressistes qui comprend notamment Cuba, le Nicaragua, le Venezuela et de petits pays caraïbéens. Il vient d’intégrer la Bolivie aux BRICS en tant que pays partenaire. Et il dénonce courageusement le génocide israélien de Gaza.

Mais la division entre les forces politiques et sociales de gauche risque de s’aggraver. Et la droite pro-impérialiste se frotte les mains en espérant triompher lors des prochaines élections présidentielles de 2025. Des partisans de Luis Arce ont demandé aux présidents de Cuba et du Venezuela ainsi qu’aux responsables de l’ALBA de jouer les médiateurs pour favoriser la réconciliation en Bolivie. Sans succès jusqu’à maintenant.

La mobilisation des masses qui soutiennent leur leader paysan et anti-impérialiste ne devrait pas fléchir avec cette tentative d’assassinat. En 2006, leur combativité et leur sagesse politique ont permis à Evo Morales et ses camarades d’accéder au pouvoir et de construire une Bolivie plus juste, démocratique et stable dans la perspective du socialisme et de l’unité des peuples de la région. Reste à espérer que cette combativité et cette sagesse politique pourront de nouveau s’imposer pour reconstruire sur de nouvelles bases une unité populaire capable de maintenir la Bolivie sur la ligne ouverte en 2006 et qui fut la meilleure période dans l’histoire récente du pays.


Source: Investig’Action

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