An Israeli Merkava tank rolls back from the Gaza Strip to an army deployment near Israel's border with the Palestinian enclave on August 4, 2014. Israel insisted there will be no end to its bloody military campaign in Gaza without achieving long-term security for its people, shunning increasingly vocal world demands for a truce. AFP PHOTO / JACK GUEZ (Photo by JACK GUEZ / AFP)

Chant de leur propre épouvante

Tuez-les tous. Pas de quartier. . Ainsi parlent les dirigeants de l’Etat le plus démocratique de la région , comme le qualifient les élites et médias occidentaux dans leur écrasante majorité. Extraits d’un texte de Smail Hadj Ali sur l’oppression et la violence colonialiste israélo-sionistes. Ce texte s’appuie sur des faits et des discours réels des oppresseurs et de leurs complices et supplétifs européens et français en particulier. Il emprunte parfois, en les fusionnant, des mots de Bertold Brecht, Pablo Neruda, Mahmoud, Darwich, Bachir Hadj Ali. Ce texte pour dire et "Mots-dire" leur propre épouvante.

Il y a un État, et il est différent de tous les autres. Il est juif, et pour cela il est plus humain que n’importe quel autre .
Elie Wiesel, Kansas City, 1970

L’armée israélienne est la plus morale du monde .
Bernard-Henri Lévy, 2010

Chant de leur propre épouvante.
.
«  Nous sommes les oiseaux de la mort
Venus sur vos cités
Femmes pour vos enfants
Vouées à trembler »
Avec nos yeux

Et ceux de nos machines
Eveillés émerveillés
Nous vous avons ciblé
Pour tuer détruire
C’est vrai y a rien à y redire
Mais nous avons
Une autre raison
Essayer de la découvrir
Devinez ? Vous ne savez pas ?
C’est si simple croyez-moi
C’est pour que vous ayez
En chœur et encore
La peur au corps
La peur encorps
Chaque jour et toujours
C’est pour vous apprendre
Et réapprendre la terreur
Chaque heure
Chaque jour
Dans vos corps
Dans vos cœurs
Nous,
Nous connaissons admirablement
Le chemin étroit
Qui conduit à l’abîme
En dormant, en priant
En riant en tuant
En même temps
Nous le trouvons
Au bon moment
Suivez-nous
Regardez-nous
Nous sommes
« Civilisation » « tolérance »
« Sagesse » « conscience »
Nos passages
Des fumées noires
Les font voir
Adeptes « de la pureté des armes » [1]
Missionnaires du feu qui tue
Des flammes
Et du « nouveau napalm » [2]
Apôtres du meurtre ciblé
Notre combat est légitimé
C’est pour cela
Que nos amis nous livrent
Sans discontinuer
Ni bourse déliée
Des armes sans compter
Et des « chants d’amour »
Ils font la différence
Comme le Président de France
Récemment en conscience
Au nom des Français
Il s’est exclamé
« C’est une inoubliable soirée »
Puis il s’est adressé
A notre boss amusé
« Je ne sais pas chanter
Mais j’aurais toujours trouvé
Un chant d’amour pour Israël
Et pour ses dirigeants
Entre nous maintenant
On ne pourra voir
Que la vie en rose »
C’est que voyez-vous
Notre politique en impose
De telles paroles
Sont compréhension
Absolution compassion
Elles nous encouragent
À vénérer le néant
Ecoutez à cet effet
Ce que racontait
Un des nôtres
Il est aussi des vôtres
Il fut chef d’état-major
À toi Dan [3]
Merci Ariel
Pilote de chasseur-bombardier
Je sais aussi larguer
Des bombes au phosphore
Du crépuscule à l’aurore
J’ai été aussi
Chef d’escadrille
D’avions Phantom
C’est eux qui chargèrent
Des bombes nucléaires
Sur ordre de Golda Meir
Pour se préparer à toute éventualité
On ne sait jamais
C’était en 1973
ll y en avait 13
On aurait pu tout foutre en l’air
Mais après-nous le déluge
Mais qui suis-je ?
Dans la vie psychanalyste
Petit fils de gazés d’Auschwitz
J’ai effacé totalement
Le regard des miens
Et ne sais plus
Ce que ma grand-mère fut
Elle n’a pas de tombe
Quand je largue une bombe
Je ressens dans mon F16
« Une très légère secousse »
Sensuelle presque douce
Une seconde après elle a disparu
Je jouis alors en trombe
C’est ce que je ressens
Quand je largue une bombe [4]
Sur les Arabes
Voluptas necandi
Mais passons
Où plutôt revenons
A nos moutons
Notre combat est intemporel
C’est une guerre perpétuelle
Du crépuscule à l’aurore
D’un commun accord
Aux Palestiniens tout le temps
Aux Libanais de temps en temps
Nous distribuons
La fin et la terreur
Guidées par des « désignateurs lasers »
Nos bombes de haute précision
Comme un chalumeau
Transforment ces multitudes en charbon
Les engins nord-américains
Entre nos mains
Tuent de jour de nuit
Et parfois même
Sans faire de bruit
Un tir précis
Sur un immeuble
Un lot d’habitations
Une école une maison
Une ambulance
Un service d’urgence
Grâce à nos bombes standards
Ne nous coûte pas plus d’un dollar
Il n’y a pas de petits profits
Dernièrement on a détruit
Chez les ghazaouis
Seize mille maisons
Grâce à nos images satellites
Tels des « cancrelats » ou des termites
Comme à Marhawine où à Aytit
À Jabalya Rafah Shadjaiyé
Nous les voyons grouiller
Pour enterrer leurs macchabées
Dans des fosses fraîchement creusées
Et parfois dans des caisses
De mauvais bois
A deux à quatre
A la fois
Et plus parfois
Maintenant
Dans ces décharges
Charniers sauvages
Ces cadavres en vrac
A Gaza comme en Iraq
Sont mis en sacs
Poubelles pêle-mêle
Nous avons pu d’ailleurs
Avec les tout derniers viseurs
Nos fameuses « Têtes hautes »
Voir qu’ils n’en n’ont plus
Pour leurs débris
Leurs organes déchiquetés
En monceaux dispersés
Et ce qui subsiste encore
De leurs dépouilles putréfiées
Par les chiens errants
Sont dévorées
De ces cadavres abondants
Ils n’en peuvent plus
Ces pauvres canidés
Ils en ont la nausée
De là-haut
Malgré la nuit noire
On peut les voir
Vomir dégueuler
Le trop plein
De leur festin
Pour l’essentiel
C’est des cadavres de terroristes
Certes il y a des vieux des gamins
Des malades de toutes sortes
De folie et d’Alzheimer
Des grands-pères
Et des grands-mères
Et des mongoliens
C’est du collatéral
On n’y peut rien
Mais j’en ai trop dit
Je vais céder la parole
A Peretz [5] ce cher Amir
Il est si l’on peut dire
N’y voyez pas une offense
Le nouveau patron de la Défense
Il n’est pas du métier
Mais il s’est vite adapté
Peretz ? :
« Merci Dan c’est sympa
De partager la parole avec moi
Chef des soldats élus
Cela me fait tout drôle
De tenir un tel rôle
C’est vrai je viens du syndicat
Avec ses meetings et son blabla
Je ne suis pas un pur militaire
Certes j’ai déjà fait cette guerre
Mais en devenir le chef
C’est une autre affaire
A vrai dire c’est tout bénef
Pour les prochaines élections
Fort heureusement
Nous sommes polyvalents
Et n’avons pas besoin
De nous recycler
Pour prendre notre part
À la défense de la liberté
Comme Malraux disait
BHL me l’a soufflé
C’est parce qu’on fait cette guerre
Sans vraiment l’aimer
Qu’on finit toujours par la gagner
« Notre armée est pure
Elle ne tue pas d’enfants »
« Nous avons une conscience
Et des valeurs
Et à cause de notre morale
Il y a peu de victimes »
De plus elle est « sympathique »
Ouverte et démocratique
Ni guindée, ni martiale
Ni sûre d’elle-même
Plus décontractée
Qu’elle tu meurs
Diriger une telle armée
Est un bonheur une destinée
Elle a « la parole libre »
La plus libre du monde
C’est vrai nous la critiquons
Mais une fois la guerre arrêtée
Et seulement dans le but d’améliorer
Nos méthodes notre efficacité
Mais aussi pour éviter
De trop tuer
Notre armée est
« Joyeuse bousculade »
Belle cavalcade
Pareils à ces jeunes « républicains espagnols »
Que Malraux a si bien décrit
C’est encore Bernard-Henri
Qui me l’a dit
Il le cite souvent dans ses écrits
Et dans ses nombreuses sorties
Ce sont « des soldats-savants »
Le nez collé sur leurs viseurs
Les yeux sur les écrans
Ils calculent la vitesse de déplacement
De toutes les cibles possibles
Et le degré de proximité
De civils et d’enfants
Pour pratiquer « l’évitement » [6]
Car notre armée est virginale
Et dans cette guerre totale
Elle ne tue pas les innocents
Oui
Il y a eu ces quatre enfants
Sur une plage de Ghaza
On dit qu’ils jouaient au football
Mais ça reste à vérifier
Si c’est vrai ça reste marginal
Ah ! Ces petits Arabes
Ils sont intenables
Mais nous allons enquêter
« Consciencieusement
Sur cet incident »
Et c’est très naturellement
On ne leur demande pas tant
Que les médias et les journaux
BFM et le Figaro
Ont repris cette info
Avec nos propres mots
Ce sont nos valeurs nos idéaux,
C’est pour cela
Encore une fois
Qu’il y a peu de « victimes [7]
Chez eux »
Quelques milliers au plus
On dit que ce sont des civils
Mais allez distinguer
Il y a des enfants
Mais nos soldats-savants
Sont aussi des enfants
Ils ne peuvent à chaque instant
Appliquer correctement
Notre principe d’« évitement »
De plus la technique n’est pas fiable
A cent pour cent
Ah oui j’allais oublier
De vous parler de toutes nos précautions
Comme par exemple
Nos « tirs d’avertissement »
Ce sont des missiles
Largués par nos avions
Sur leurs immeubles
Et leurs maisons
Vous voyez tout est fait
Pour ne pas trop tuer
Nous venons même de créer
Une « banque de cibles »
Nous ne sommes pas infaillibles
Nous avons établi aussi
Une « carte de la souffrance »
Ça améliore nos performances
Ça limite les « bavures »
Mais les Arabes
Ça bouge tout le temps
Comme l’a bien martelé
Un de nos comiques troupiers
A la télé des Français
Les Arabes doivent mieux contrôler
Leurs impossibles nichées
Ils doivent les tenir en laisse
Avant lui il y a deux décennies
Ce cher Anthony Burgess
L’avait dit et redit :
« Ces gens sont comme les chiens
Ils ne comprennent que le bâton »
Menahem en avait dit autant
Avec raison
Ce sont « des bêtes
Qui marchent sur deux pieds »,
« Des criquets qui devraient être écrasés »
A ce propos je ne résiste pas à l’envie
De vous citer quelques bons mots
De nos chefs et généraux
Ça peut paraître exagéré
Mais je n’ai rien inventé
En voici quelques extraits
« Les palestiniens
Sont des criquets …
Ils seront écrasés
Et leurs têtes éclatées
Contre les murs et les rochers » [8]
« Comme des cafards drogués [9]
Dans une bouteille
Les Arabes tournent en rond »
« Ils sont comme des crocodiles
Plus vous leur donnez de viande
Plus ils en veulent » [10]
« Ce sont des cancrelats dans un bocal »
Bon, arrêtons là ce festival
Nous venons de bombarder une zone du Mal
Il semble que c’est leur quartier général
On me dit que c’est un hôpital
Je vais aux nouvelles fraîches
Je vous vois plus tard,
Probablement ce soir
Je viendrais parler
À vos journaux télévisés
De notre combat civilisé
VOIX D’UN ENFANT PALESTINIEN TUÉ PAR UNE BOMBE ALORS QU’ILJOUAIT AU FOOTBALL.
Venez voir le sang dans nos rues
Venez voir le sang dans nos rues
Le sang dans nos rues
Dans nos rues
Le sang
Nos rues
Venez voir
Venez voir
Nous vivons dans des mouroirs
Ils nous tuent à bout portant
À tout bout de champs
Hier nous jouions au ballon
À Ghaza sur la plage
Zakaria Ahed
Mohamed Ismaël
Deux missiles d’Israël
Nous ont pulvérisés
Par le travers en mille
Et trahi notre insouciance
Mais soyez sans crainte
Le cœur de la Terre bat
À Jenin à Ghaza
À Deir Yassine à Ramallah
À Khan Younes et à Qana
« Le cœur de la Terre bat
Il saigne, mais il bat »
Nous continuerons à jouer au ballon
Sur nos plages notre sable
Nous grandirons garçons et filles
« Et de nos mains surgira un fusil
D’où jailliront les balles
Qui trouveront l’endroit du cœur »
De ces assassins chacals
Que le chacal repousserait
Des charognardes hyènes
Que l’hyène fuirait
« Pierres que la pierre
En crachant mordrait
Venins de vipères
Que les vipères vomiraient »
Mais soyez sans crainte
« Nous cultivons l’amour la vie
Pour notre humble patrie
Et la certitude du yasmine »
Pour notre belle Falestine

Smaïl Hadj Ali

Texte réouvert en 2006…

[1] Bernard –Henry Lévy, dixit.
[2] Bombes au phosphore blanc.
[3] Dan Halutz, chef d’Etat-major.
[4] Propos de Dan Halutz, chef d’état-major de l’armée israélienne.
[5] Ministre de la défense, anciennement chef du syndicat Histadrout
[6] Extrait d’un texte de Bernard Henry Lévy
[7] « Tsahal » , film de Claude Lanzmann
[8] Itzhak Shamir
[9] Raphaël Eytan
[10] Ehud Barak

Source: Le Grand Soir

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