Au même titre que Donald Trump, Benyamin Netanyahou a tweeté: «Nous construisons et nous continuerons à construire.» Ainsi, après avoir «révélé» la construction – évidemment planifiée depuis longtemps – de 566 logements dans la partie occupée de Jérusalem, l’entreprise de colonisation s’amplifie à un rythme croissant: 2500 nouveaux logements de colonisation en Cisjordanie sont annoncés le 24 janvier 2017. A cela s’ajoute la construction de 100 logements dans la colonie de Bet El, proche de Ramallah, une colonie décrite par le quotidien Haaretz du 18 décembre 2016 comme «celle préférée de l’équipe Trump en Cisjordanie», puisque recevant des dons de sa Fondation et de son entourage.
Ces actes et déclarations constituent la réponse concrète du pouvoir colonial israélien à la résolution adoptée le 23 décembre 2016 par l’ONU, grâce à l’abstention des Etats-Unis.
Lundi 23 janvier 2017, Benyamin Netanyahou, affirmait que «nous sommes en face d’une chance formidable [avec l’accession de D.Trump] pour la sécurité et l’avenir de l’État d’Israël». Colonisation et soutien aux dictatures forment un ensemble de la politique de l’Etat sioniste. L’article publié ci-dessous illustre ce dernier aspect à propos des relations entre la Birmanie et Israël. (Rédaction A l’Encontre)
Les dirigeants de l’armée du Myanmar se sont livrés à une frénésie d’achats auprès des industries israéliennes d’armement. Ils ont même rencontré le président et le chef d’Etat-major israéliens. Malgré les crimes de guerre qui sont commis par ce pays du Sud-Est asiatique, Israël continue à maintenir d’importants liens avec lui dans le domaine dit de la «sécurité».
Les défenseurs des droits humains israéliens déposent une requête officielle auprès de la Cour suprême pour que cette dernière oblige le ministre de la Défense à expliquer pourquoi il ne met pas un terme aux accords commerciaux avec les militaires du Myanmar suite aux rapports concernant des crimes commis contre des citoyens et des minorités ethniques de ce pays, y compris de possibles crimes contre l’humanité.
La requête a été déposée par le procureur Eitay Mack et par une série de militants des droits humains. Elle fournit des précisions sur les crimes qui ont été commis par le régime et continuent à l’être, et apporte notamment des preuves sur liens importants qui ont été établis entre, d’une part, les dirigeants militaires birmans et, d’autre part, des cadres supérieurs du gouvernement et de l’armée israéliens ainsi que des entreprises de sécurité.
Depuis que le Myanmar (également connu sous le nom de Birmanie) a gagné son indépendance de la Grande-Bretagne en 1948, une guerre civile continuelle a été menée dans plusieurs régions du pays. En novembre 2015, la Birmanie a tenu des élections démocratiques, gagnées par Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Nobel de la Paix [1].
Cependant le gouvernement ne contrôle réellement ni les forces de sécurité de l’Etat ni les milices privées, qui obéissent encore à la Junte qui contrôlait le pays jusqu’à ces élections. Or ces forces continuent à commettre des crimes contre l’humanité,des crimes de guerre et les violations graves des droits humains partout dans le pays, en particulier contre les minorités ethniques, dont certaines populations ne bénéficient même pas d’un statut de citoyenneté. Elles continuent à perpétrer des crimes de guerre et à violer la loi internationale dans les zones de conflit, en particulier celles de Shan et de Kachin, où des tueries, des arrestations, des tortures et des viols sont commis à grande échelle contre des civils et contre toute personne soupçonnée de soutenir les rebelles.
Ce qui a motivé le dépôt de cette requête actuellement ce sont les actes commis contre la population Rohyngya. La dernière en date des opérations des forces de sécurité en octobre dernier dans l’Etat de Rakkhine a entraîné des tortures, des disparitions et des assassinats de civils. Des femmes et de jeunes filles sont violées et des villages entiers sont incendiés.
Les déclarations par l’ONU et un rapport publié par des chercheurs à Harvard dénoncent les crimes contre l’humanité que commet la Junte dans les régions de Shan et de Kachin. Mais selon le rapport, le gouvernement israélien continue à fournir des armes au régime. Toujours selon ce rapport, le général Maung Aye est, entre autres, responsable de ces crimes.
Maung a visité Israël en septembre 2015. Les dirigeants de la Junte se sont rendus en Israël pour faire un plein d’achats auprès des industries israéliennes de sécurité. A cette occasion ils ont rencontré le président israélien Reuven Rivlin, le chef d’Etat-major de l’armée israélienne et les dirigeants des systèmes de défense. Ils ont même été hébergés dans des bases des forces aériennes et navales israéliennes. Michael Ben Baruch, directeur du département israélien des exportations dans le domaine de la sécurité, a visité Myanmar l’année dernière. Selon la requête d’Eitay Mack, Israël a fourni au Myanmar des fusils d’assaut et un entraînement militaire, l’été dernier.
Au cours de cette visite – cachée aux médias – et dont nous publions ici les premières photos, les chefs de la junte ont admis avoir acheté des navires de patrouille Super Dvora ainsi que des équipements et un entraînement.
En août 2016, Tar Ideal Concept LTD, une entreprise israélienne qui fournit de l’équipement militaire et de l’entraînement, a posté sur son site des photos d’entraînements avec des fusils CornerShot fabriqués en Israël, en annonçant fièrement que ces fusils étaient utilisés par les militaires au Myanmar. Selon le site de l’entreprise, l’ex-chef de la police israélienne, Shlomo Aharonishki fait partie de conseil de direction.
Malgré les rapports confirmant les villages brûlés, les viols et les autres crimes contre l’humanité, le ministre de la Défense israélien a pour l’heure refusé de stopper les exportations de matériel de sécurité en Birmanie et d’annuler les permis d’exportation en question.
Cette situation ne devrait pas nous surprendre. En effet, il se passait des choses similaires lors des génocides au Rwanda et en Bosnie dans les années 1990, et Israël a également coopéré dans l’assassinat de militants de gauche en Argentine et au Chili dans les années 1970. Mack a également déposé une requête exigeant que ces crimes plus anciens et la collaboration israélienne dans ces crimes soient exposés.
Dans le cas de la Birmanie, tout comme dans celui du Soudan du Sud, le ministère de la Défense persiste à poursuivre les exportations. Or ces crimes sont commis en ce moment – et ils peuvent être stoppés. (Article publié sur le site israélien +972; traduction A l’Encontre)
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[1] «Désormais, ils osent la critiquer. Les musulmans de Birmanie, qui représentent moins de 5% de la population, n’ont plus le même respect pour la lauréate du Prix Nobel de la Paix 1991. «Nous nous demandons pourquoi elle ne fait rien pour nous», s’interroge Mohamed (nom d’emprunt), un jeune musulman de l’ethnie rohingya. Comme 100’000 autres, la plupart apatrides, il vit dans un camp de déplacés depuis les violences religieuses de 2012.
Le 9 octobre 2016, plusieurs groupes d’assaillants non identifiés ont attaqué trois postes frontières de cette région de l’ouest de la Birmanie, adossée au Bangladesh. L’armée a ensuite mené des «opérations de sécurité», tuant plus de 80 suspects. Certains sont morts en détention.
Les militaires sont suspectés de représailles contre la minorité rohingya, longtemps persécutée en Birmanie. L’ONU a affirmé recevoir quotidiennement des accusations de viols et d’exécutions extrajudiciaires dans cette région. Le gouvernement d’Aung San Suu Kyi nie les faits relatés. Il reproche à la presse et aux organisations internationales de colporter des rumeurs. Pourtant, 65’000 Rohingyas ont fui les opérations militaires en trouvant refuge au Bangladesh ces trois derniers mois.
«Nous n’avons pas accès aux régions touchées par les opérations militaires pour évaluer les besoins humanitaires, et y répondre, regrette Pierre Péron, porte-parole de l’Agence pour la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) à Rangoun. Ce gouvernement est pire que le précédent (celui des anciens militaires) en ce qui concerne l’accès des personnels humanitaires.» Dans le nord de l’Arakan, les cliniques mobiles de santé primaire gérées par les organisations non gouvernementales sont fermées.
L’ONU n’hésite plus à critiquer le gouvernement d’Aung San Suu Kyi pour sa gestion de la crise arakanaise, qualifiée de « «contre-productive» et focalisée sur le «court terme». L’institution estime que les conditions de sécurité très instables dans l’Arakan ne peuvent justifier un blocage presque total de l’aide humanitaire ces trois derniers mois.
Elle a évoqué la possibilité de «crimes contre l’humanité» et demandé à Aung San Suu Kyi de se rendre sur place pour évaluer la situation, ce qu’elle n’a pas fait. Un représentant du Haut-Commissariat aux réfugiés a parlé de «nettoyage ethnique», confirmant les allégations de «meurtres, massacres, viols et pillages». (La Croix, 18 janvier 2017)
Source: A l’encontre