Jusqu’à 50 médecins et infirmières qui ont soigné des manifestants anti-gouvernementaux blessés au cours des récentes manifestations à Bahreïn ont été accusés hier de conspiration contre l’Etat.
Dans une escalade répressive du gouvernement du Bahrein contre ??les manifestations, le personnel médical a été accusé de « soutenir les efforts visant à faire tomber le gouvernement » et « à nuire au public par la diffusion de fausses nouvelles ».
Certains ont également été accusés d’avoir causé la mort de deux manifestants en « leur infligeant des blessures supplémentaires » ou en leur donnant « des traitements inutiles. »
Ce sont en tout 23 médecins et 24 infirmières qui ont été inculpés et qui seront jugés par un tribunal militaire, a dit le ministre de la Justice Khaled bin Ali Al Khalifa. « La profession médicale a connu beaucoup d’abus pendant cette période », a-t-il dit.
Les organisations médicales ont exprimé leur indignation contre cette agression juridique sur la profession, des travailleurs de la santé ayant été enlevés à leur domicile et dans les hôpitaux et emmenés par les militaires.
En vertu des Conventions de Genève, les personnes blessées dans les conflits ont droit aux soins médicaux, indépendamment du côté dans lequel ils se trouvent.
Richard Sollom, directeur adjoint de l’organisation Physicians for Human Rights et qui a mené une enquête dans le pays le mois dernier, a déclaré : « Nos conclusions sont que les médecins et les autres membres du personnel ont fourni des soins correspondant à l’éthique [de leur profession] et pour tenter de sauver la vie de manifestants qui ont été abattus et blessés par les forces de sécurité. Ce sont de fausses accusations. Je ne crois pas que le gouvernement ait le moindre argument à sa disposition. »
Le docteur Sollom a dit également qu’il avait essayé de se rendre au centre médical Salmaniya, le plus grand hôpital du pays, mais qu’il avait été arrêté à l’entrée. « L’hôpital est complètement militarisé avec des soldats portant des masques et des fusils d’assaut à chaque étage. C’est un pays riche avec un système de santé sophistiqué… et qui est maintenant complètement militarisé. »
Ces accusations représentent la dernière initiative du gouvernement sunnite pour intimider l’opposition des Musulmans chiites. Deux anciens députés, membres d’Al Wefaq, le principal parti chiite et soutien politique de premier plan de la contestation au Bahreïn, ont été arrêtés lundi [2 mai] selon un chef de file du parti.
Au moins 13 manifestants et 4 policiers ont été tués et des centaines de personnes blessées dans des affrontements lors des manifestations qui ont débuté à la mi-février. Les hôpitaux ont été débordés et le personnel médical a eu beaucoup de mal à faire face à la situation.
Une série de courriels entre un chirurgien du centre médical Salmaniya et le professeur britannique qui l’a formé, publiés le mois dernier par The Independent, a donné un aperçu concret de la pression exercée sur le personnel médical.
« Je suis à l’hôpital, épuisé et débordé par le nombre de jeunes victimes mortellement blessées. C’est le génocide de notre peuple et nos médecins de l’hôpital et les infirmières sont pris pour cible par des milices pro-gouvernementales parce qu’ils aident les patients, » a-t-il écrit ??le 15 mars.
Les forces de Bahreïn ont pris d’assaut l’hôpital en disant qu’il était devenu « envahi par l’activité politique et sectaire. » Les organisation de défense des droits humains estiment que c’était un acte d’intimidation et elles ont accusé le Bahrein de s’attaquer aux hôpitaux pour se saisir des personnes blessées pendant les manifestations.
Le ministre de la Justice a prétendu lors d’une conférence de presse hier [3 mai], que les médecins du centre médical Salmaniya avaient délibérément blessé un manifestant qui était arrivé avec une blessure à la cuisse, le faisant saigner à mort. Dans un autre cas ils auraient opéré inutilement un manifestant qui avait reçu une balle dans la tête. Dans les deux cas, les médecins seraient accusés de « voies de faits qui ont conduit à la mort », a-il dit.
D’autres médecins et infirmiers font face à des accusations allant de l’incitation à la haine contre le système politique jusqu’à la possession d’armes et au détournement de fonds publics.
Traduction : Info-Palestine