Définir une voie pour le socialisme en Afrique

La conférence « Les dilemmes de l’humanité : Dialogues panafricains pour la construction du socialisme » s’est ouverte en Afrique du Sud le 17 juillet 2023. Elle réunissait des organisations et des mouvements actifs sur le continent avec l’objectif d’établir des stratégies concrètes pour forger une lutte unifiée et concertée contre la violence du capitalisme et de l’impérialisme.

Quelle voie allons-nous emprunter pour bâtir le socialisme ? Cette question a animé le premier jour de la conférence « Les dilemmes de l’humanité : Dialogues panafricains pour la construction du socialisme » qui s’est tenue en Afrique du Sud du 17 au 20 juillet.

Des commissions ont été organisées, ayant chacune pour mandat de délibérer sur un thème particulier et d’établir un plan d’action concret susceptible de faire l’objet d’une résolution le dernier jour de la conférence. Les commissions du 17 juillet portaient sur la souveraineté alimentaire et l’agroécologie, les luttes de genres contre le patriarcat, et la lutte pour le logement en ville.

Quarante organisations et mouvements citoyens venus de toute l’Afrique se sont réunis au cours de ces quatre jours de travail et ont débattu sur ces questions. Tous s’accordent sur un même constat : « le capitalisme n’a pas de solutions aux problèmes auxquels l’humanité est confrontée ». Non seulement le capitalisme est fondamentalement incapable de répondre aux crises qui affectent une majorité de la population mondiale aujourd’hui, mais il devient d’autant plus violent que ses échecs deviennent plus visibles. Que la conférence se tienne en Afrique du Sud en est la preuve.

Faisant écho à ce contexte, S’bu Zikode, le président et membre fondateur du mouvement des socialistes des bidonvilles (Abahlali baseMjondolo (AbM), Afrique du Sud) a déclaré dans son discours d’ouverture de la conférence : « Nous ne savions pas qu’en mettant l’accent sur notre humanité, nous nous retrouverions en guerre. Une guerre menée avec des balles réelles, des balles en caoutchouc, des gaz lacrymogènes, des comparutions au tribunal, des peines de prison, des mensonges et de la calomnie. Nous savons que nous sommes pauvres afin que d’autres puissent s’enrichir. Nous savons que nous sommes maintenus dans la pauvreté pour que d’autres puissent restés riches… Il n’y aura pas de justice tant que le capitalisme ne sera pas éliminé de la surface du globe, et la terre, la richesse et le pouvoir partagés de façon équitable. De notre point de vue le socialisme, ou ce que nous avons appelé le communisme vivant, doit être construit à partir de la base. »

Se prémunir de “l’élite” et des ONG

Zikode a souligné la nécessité pour les mouvements de renforcer leur pouvoir et de défendre leurs acquis car même des victoires partielles suscitent les attaques de ceux qui détiennent le pouvoir. Un élément central du projet est d’assurer l’autonomie et la direction politique des mouvements populaires face aux tentatives de certaines ONG, personnalités ou d’universitaires de détourner leurs luttes. « Nous avons le devoir de construire des organisations plus fortes et indépendantes, avec des leaders responsables devant leurs membres. C’est à cette condition qu’un mouvement gagnera en puissance», a déclaré Zikode à Peoples Dispatch. « Notre humanité n’est pas négociable, notre autonomie et notre droit à décider pour nous-même n’est pas négociable », a-t-il ajouté lors de la conférence. Les mouvements doivent défendre leur autonomie, mais « nous devons aussi construire des mouvements de mouvements et des communes de communes. Pour nous, le socialisme est un concept qui parle aux valeurs d’humanité ; il est par conséquent important de ne pas travailler seuls, isolés les uns des autres. N’oublions pas que les forces oppressives essaient de diviser les pauvres et les opprimés et de les monter les uns contre les autres afin que nous ne puissions pas unir nos forces face à l’oppression ».

L’importance de l’unité a également été soulignée par Irvin Jim, le secrétaire général de l’Union nationale des métallurgistes d’Afrique du Sud (National Union of Metalworkers of South Africa -NUMSA) : «  Peu importe que nous soyons séparés par des rivières ou des forêts, nous voulons un autre monde, un monde sans oppression, un monde libéré de l’exploitation, un monde qui fait progresser l’humanité plutôt que l’avidité. Nous ne voulons pas du pain, nous voulons la boulangerie !» Selon lui la tâche consiste à élaborer un programme révolutionnaire et à mobiliser les travailleurs autour de ce programme.

Fini de se battre pour l’Occident

La nécessité d’articuler des objectifs révolutionnaires a aussi été réaffirmée par Kwesi Pratt Junior, le secrétaire général du Mouvement socialiste du Ghana (Socialist Movement of Ghana – SMG), durant son discours inaugural aux délégués. En particulier, il s’agit de rejeter toute tentative des forces impérialistes d’entraîner les pays africains dans des conflits destinés à maintenir leur hégémonie. « Nous ne nous battrons pas aux côtés de la Grande-Bretagne, ni de l’Allemagne, ni de la France, et nous ne nous battrons jamais aux côtés des Etats-Unis. Plus jamais nous ne ferons la guerre pour eux. Nous livrerons nos propres batailles : pour la nourriture, pour élargir l’accès à l’éducation, pour améliorer l’accès de tous à une santé de qualité, pour nous débarrasser de l’impérialisme et pour nous allier avec le reste du monde qui souffre de l’oppression impérialiste. »

Kwesi Pratt a ajouté « Notre lutte est internationale, notre lutte vise à rendre le monde meilleur, notre lutte vise à s’associer à toutes les autres dans l’objectif de porter un coup fatal à l’impérialisme. Et je sais que nous y parviendrons car il n’y a pas d’autres options. Nous bâtirons le socialisme en Afrique et ailleurs dans le monde. Le socialisme l’emportera sur le capitalisme car c’est le seul système à même de garantir justice et équité, aussi bien au plan économique et social que politique. »

Source: Peoples Dispatch
Traduit de l’anglais par Françoise Breton pour Investig’Action

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