Qu’est-ce que l’apartheid israélien ?

Tout ce qu’il faut savoir sur l’apartheid israélien, son contexte actuel, son vocabulaire et la résistance palestinienne.

En Palestine, l’apartheid est né du projet colonial des colons sionistes qui ont imposé la création de l’État d’Israël en 1948 – un événement connu sous le nom de Nakba (ou « catastrophe ») en arabe.

Les Palestiniens ont compris depuis longtemps que le colonialisme sioniste est un projet continu visant à effacer et à remplacer la population autochtone de Palestine. L’apartheid est l’un des mécanismes utilisés par les colons pour supprimer les populations autochtones qui ont survécu à la Nakba.

Ce système d’apartheid a été mis en place par les Afrikaners en Afrique du Sud, qui voulait un moyen radical pour supprimer la population noire majoritaire. Ironiquement, l’apartheid a été institutionnalisé en Afrique du Sud en 1948, la même année que la Nakba.

Après la fin de l’apartheid en Afrique du Sud, en 1998, le statut de Rome de la Cour pénale internationale a déclaré que l’apartheid était un crime contre l’humanité et l’a défini comme « des actes inhumains commis dans le contexte d’un régime institutionnalisé d’oppression et de domination systématiques d’un groupe racial sur un ou plusieurs autres groupes raciaux et commis dans l’intention de maintenir ce régime ».

Bien que beaucoup associent l’apartheid à l’Afrique du Sud, la définition est applicable universellement et peut adopter diverses caractéristiques et se manifester de diverses manières. Cette définition du droit international remet donc en cause l’idée fausse selon laquelle l’apartheid était un cas exceptionnel qui aurait depuis pris fin.

Depuis 1948, le régime israélien a étendu le mécanisme de l’apartheid au peuple palestinien pour le contrôler et surtout le dominer.

Ce système complexe de ségrégation est au service du maintien de la suprématie juive israélienne sur les habitants palestiniens de la terre palestinienne. La fragmentation est l’un des principaux moyens utilisés par le régime israélien pour maintenir et entretenir l’apartheid.

En effet, Israël a divisé les Palestiniens en quatre catégories : les Palestiniens ayant la citoyenneté israélienne et soumis au droit civil israélien, les Palestiniens ayant le statut de résident permanent dans la partie orientale de Jérusalem, les Palestiniens de la Cisjordanie occupée et de Gaza soumis aux lois militaires israéliennes, et les réfugiés palestiniens vivant en exil en dehors de la Palestine historique.

Quel est le contexte historique et actuel ?

Après des décennies de mobilisation et d’accumulation de moyens, le projet colonial des colons sionistes a créé l’État d’Israël en 1948 en procédant au nettoyage ethnique de la Palestine.

Plus de 750 000 Palestiniens ont été expulsés de leur patrie et plus de 400 villages et villes palestiniens ont été détruits. Ceux qui ont été chassés sont devenus des réfugiés dans les pays voisins. On estime aujourd’hui à 7 millions le nombre de ces Palestiniens et de leurs descendants.

Aujourd’hui encore, le régime israélien refuse aux Palestiniens le droit internationalement reconnu de retourner dans leur foyer d’origine et de retrouver leurs biens.

Après le nettoyage ethnique de 1948, les forces sionistes ont conquis près de 80 % de la Palestine historique et les survivants (environ 100 000) ont été placés sous strict régime militaire.

Dans les premières années de l’État, les dirigeants sionistes ont discuté de la possibilité d’expulser cette population survivante, mais ils ont finalement décidé de lui accorder une citoyenneté nominale et d’inscrire son inégalité dans les lois fondamentales de l’État.

Le régime israélien établit une distinction juridique claire entre la nationalité et la citoyenneté afin d’institutionnaliser la discrimination et la ségrégation.

Ce moment a marqué la naissance de l’apartheid israélien. Aujourd’hui, cette communauté est désignée sous le nom de citoyens palestiniens d’Israël et vit dans ce que l’on appelle les territoires de 48 – les terres occupées par les forces sionistes en 1948. Les deux communautés mènent des vies très séparées, différentes et inégales.

L’apartheid israélien a été étendu au reste de la Palestine historique en 1967, lorsque les Israéliens ont conquis la Cisjordanie, Gaza et le Golan syrien. Les populations palestiniennes ont été placées sous un régime militaire, mais contrairement à leurs frères des territoires de 48, elles n’ont pas reçu la citoyenneté.

Presque immédiatement, le gouvernement israélien a commencé à construire des colonies exclusivement réservées aux juifs israéliens dans les territoires nouvellement occupés. Parallèlement, il a construit des infrastructures telles que des routes, des centrales électriques et des exploitations agricoles, toujours pour les seuls juifs israéliens.

En novembre 1967, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 242, qui demandait le retrait immédiat des forces israéliennes des territoires nouvellement occupés. Depuis lors, la communauté internationale considère généralement que les colonies israéliennes dans les territoires de 1967 sont illégales.

Aujourd’hui encore, les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza vivent respectivement sous un régime militaire et un siège brutal. Tous les aspects de leur vie sont fortement contrôlés par le régime israélien, qu’il s’agisse des déplacements ou de l’accès aux produits de première nécessité.

L’importance du vocabulaire : en quoi son aseptisation a-t-elle été préjudiciable à l’exposition de la vérité de la situation ?

Le terme « apartheid » est important car il décrit avec précision la réalité quotidienne du peuple palestinien. Ce terme est inscrit dans le droit international en tant que crime contre l’humanité et l’apartheid doit donc disparaître.

L’étude de cas de l’Afrique du Sud nous fournit des exemples concrets d’actions qui peuvent être entreprises contre les régimes d’apartheid : le boycott et les sanctions.

Mais l’apartheid n’est pas tout ; en Palestine, l’apartheid fonctionne comme un outil du colonialisme israélien. Ce cadre est essentiel pour comprendre la situation dans son ensemble. En effet, la fin du régime israélien d’apartheid ne conduira pas nécessairement à la décolonisation.

Le colonialisme de peuplement israélien cherche à effacer le peuple autochtone palestinien de sa terre. Nous ne pouvons pas exclure ce cadre lorsque nous parlons de l’apartheid israélien – les deux termes sont interdépendants.

Casser les mythes

  • Israël ne peut pas être un État d’apartheid parce qu’il y a des Arabes au Parlement !
    Des citoyens palestiniens d’Israël siègent au Knesett (le parlement israélien), mais ils ne sont pas égaux à leurs pairs juifs israéliens. En effet, en Israël, contrairement à la plupart des pays, la citoyenneté et la nationalité sont des termes et des catégories distincts.
    Si la citoyenneté israélienne existe, il n’y a pas de nationalité israélienne ; la nationalité est plutôt désignée selon des critères religieux/ethniques qui sont enregistrés dans les bases de données des registres.
    Comme l’État israélien se définit constitutionnellement comme juif, ceux qui ont la nationalité juive l’emportent sur la population non juive (essentiellement palestinienne). La nation juive et l’État d’Israël étant considérés comme une seule et même entité, l’exclusion des citoyens non juifs en est la conséquence.
    Cette différenciation entre citoyenneté et nationalité permet la mise en place d’un système raciste sophistiqué et dissimulé, qui n’est pas nécessairement détectable par l’observateur non averti. Ce système divise les gens en deux catégories (juifs et non-juifs), ce qui correspond à la définition même de l’apartheid.
  • Les Palestiniens ont leur propre gouvernement – l’Autorité palestinienne – alors comment peut-on parler d’apartheid ?
    L’Autorité palestinienne a été créée à la suite des accords d’Oslo de 1993 en tant qu’organe de gouvernement provisoire. Elle s’est vu accorder une « autonomie » sur certaines enclaves de Cisjordanie, à l’instar des bantoustans de l’Afrique du Sud de l’apartheid. Elle fonctionne essentiellement comme un prestataire de services pour la population palestinienne dans certaines régions de Cisjordanie.
    Mais l’Autorité palestinienne n’a aucun pouvoir réel et n’est certainement pas un organe souverain. La meilleure preuve en est peut-être que même le président de l’Autorité palestinienne doit obtenir l’autorisation du régime israélien pour quitter la Cisjordanie.
  • Il s’agit d’un problème lié à la politique de droite en Israël, et non à l’État lui-même.
    L’État israélien est un État colonial de colons, établi à la suite du nettoyage ethnique de la Palestine en 1948. Il a affirmé constitutionnellement ce caractère colonial en se définissant comme un État réservé à ses citoyens juifs et en maintenant son occupation militaire des territoires de 1967.
    La soi-disant gauche en Israël est autant complice de la colonisation et de l’apartheid que la droite. En effet, l’entreprise de colonisation a été lancée par un gouvernement travailliste israélien en 1967.

Quelles sont les formes de la résistance palestinienne à l’apartheid ?

Les Palestiniens ne sont pas restés silencieux face à l’apartheid israélien. En effet, leur résistance a été multiforme et diversifiée au cours de nombreuses décennies.

De la première Intifada, à la fin des années 1980, qui a mobilisé la désobéissance civile populaire, à l’Intifada de l’Unité, plus récente, de 2021, qui a cherché à unir les fragments de la Palestine par-delà les frontières coloniales, les Palestiniens n’ont pas seulement été inébranlables sur leur terre, mais ils ont passé des décennies à s’organiser et à se mobiliser dans et hors la Palestine pour gagner un soutien à leur lutte de libération.

Le plus grand mouvement populaire palestinien est le mouvement BDS, qui s’inspire de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud.Il appelle la communauté internationale à boycotter, désinvestir et sanctionner le régime israélien pour ses crimes contre le peuple palestinien.

 

Source : https://www.chroniquepalestine.com/qu-est-ce-que-l-apartheid-israelien/

 

Photo: Anne Paq/Activestills.org, Bethlehem checkpoint, 16.01.2012.

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