Pollution radioactive au tritium de l’eau du robinet en France

En France, 6,4 millions de personnes sont concernées par la présence de pollution au tritium dans l’eau du robinet.

 

 

A Paris et en Ile de France, l’eau du robinet est radioactive. Presque deux millions de personnes alimentées par l’usine d’eau potable de Choisy-le-Roi consomment une eau polluée par un élément radioactif le tritium. L’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro) a révélé cette contamination dans sa publication du 17 juillet 2019. La concentration moyenne de cette eau atteint les 10 Bq/L (becquerel par litre).

Ce n’est pas un cas isolé car, en France, 6,4 millions de personnes sont concernées par la présence de pollution au tritium dans l’eau du robinet.

 

Qu’est-ce que le tritium?

 

C’est un atome d’hydrogène radioactif et sa demi-vie est de 12,32 ans. Ce qui veut dire qu’après 12,32 ans, il en reste encore la moitié et ainsi de suite.

D’une manière générale, est-ce dangereux pour la santé de boire une eau contenant du tritium?

Le tritium a une radiotoxicité faible. Il émet des rayons radioactifs bêta sur une faible distance. Sa demi-vie de 12,32 ans, lui laisse largement le temps d’aller s’infiltrer là où il se trouve.

Aucune étude ne permet de savoir s’il peut causer le cancer chez l’homme. Toutefois, « certaines études ont … montré de façon très nette que, chez des animaux, l’exposition ou l’injection de tritium entraînait une importante augmentation des cancers. » .

Ce que l’on sait scientifiquement c’est qu’il s’incorpore facilement à l’eau. Et sachant que 65% de notre corps est fait d’eau, il peut facilement s’y intégrer et passer dans le sang.

« Le tritium peut poser un risque pour la santé s’il est ingéré par la consommation d’eau ou de nourriture, ou s’il est inhalé ou absorbé par la peau. » « L’eau tritiée (contenant du tritium) a été estimée être la première source de risque d’ exposition humaine au tritium »

Dans le Livre Blanc du Tritium de l’ASN, il est reconnu que les risques du tritium sont sous-évalués. En effet, un rapport d’experts a montré que le tritium peut s’intégrer à l’ADN. Alors, les rayons ionisants (rayons radioactifs) du tritium risquent d’endommager l’ADN.

Le danger du tritium provenant de l’industrie du nucléaire est si important que les sénateurs de notre Sénat (chambre haute du Parlement français ) ont rédigé un texte sur le sujet.

Le site du Sénat écrit concernant les dangers de la contamination interne par le tritium que le résultat des expériences sur le tritium « nous imposent d’appliquer strictement le principe de précaution et de tout mettre en oeuvre pour réduire au maximum l’exposition au tritium des travailleurs et des populations ».

«  Les rejets de tritium dans l’environnement risquent de devenir dans les années à venir un problème majeur et certainement un des principaux axes de la contestation antinucléaire. »

 

Est-ce dangereux pour la santé de boire l’eau de Paris et d‘Ile de France ayant une concentration moyenne de tritium de 10 Bq/L?

 

Dejà, l’idée de boire une eau radioactive est fortement déplaisante. D’autant plus, lorsqu’on sait qu’il s’agit d’une radioactivité artificielle provenant des rejets radioactifs liquides dans la Seine de la Centrale Nucléaire de Nogent située à environ 100 km en amont de Paris. Et oui, aussi aberrant que se soit, une centrale nucléaire a été construite en amont de Paris alors que l’on savait qu’elle rejetterait de la pollution radioactive dans l’eau venant alimenter les réservoirs d’eau potable de Paris!

Revenons à notre question.

La Préfecture d’Île-de-France se veut rassurante et dit qu’à Paris « l’eau du robinet peut être consommée ».

Le Parisien va jusqu’à parler de « rumeurs de pollution » . Ceci est de la pure désinformation car l’ACRO est un organisme agrée avec qui Greenpeace a pour habitude de travailler. De plus, l’ACRO s’est basé sur les données fournies par le Ministère de la Santé pour faire cette étude.

Entre parenthèse, ne trouvez vous pas choquant que ce soit l’ACRO qui sonne l’alerte alors que les services de l’État avaient les informations !

Selon Eau de Paris, entreprise publique qui gère l’eau potable à Paris, la pollution au tritium ne représente aucun risque car les mesures sont en dessous de la référence de qualité française.

Cette remarque incite à se poser la question suivante.

A partir de quelle quantité est-il dangereux de boire de l’eau contenant du tritium ?

Pour le tritium, la référence de qualité de la réglementation française est de 100 Bequerelles par litre (transposition d’une directive de l’Union Européenne). Sachant que la radioactivité naturelle des eaux de surface se situe entre 0,1 et 0,9 Bq/L (UNSCEAR), et que dans les nappes phréatiques anciennes, (qui n’ont pas été touchées par les retombées en tritium des essais nucléaires) les niveaux de tritium sont de l’ordre de 0,1 Bq/L, cette référence de qualité correspond, donc, à plus de 100 fois la radioactivité naturelle.

Il y a un problème supplémentaire: il n’y a rien de contraignant pour faire respecter cette référence. Elle peut être dépassée, en toute impunité.

Pour l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la valeur de référence est de 10 000 Bq/L. Soit 100 fois plus que la référence européenne et française. Les variations de ces valeurs de références interrogent sur leur crédibilité.

La CRIIRAD conteste ce chiffre de l’OMS car il est le résultat d’un calcul et non pas d’une expérience scientifique. Qui plus est ce chiffre de 10 000 Bq/L a été arrondi, par l’OMS, largement au dessus du résultat du calcul initial qui était de 7 800 Bq/L.

 

Pourquoi, l’OMS donne une valeur de référence pour le tritium si contestable et arrondi « au dessus » au détriment de la santé des populations?

 

C’est peut être car l’OMS est liée à l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) qui est pro nucléaire. C’est étonnant ce lien! En effet, Dr. Michel Fernex ancien médecin de l’OMS dénonce ce qu’il appelle les « liens malsains » entre l’OMS et l’AIEA comme l’accord référencé «WHA12-40», l’exigence de confidentialité dans certains domaines ou le fait que l’OMS répète les chiffres de l’AIEA. L’OMS ne fait pas ses propres mesures de la radioactivité.

Il y a une seconde hypothèse, selon la CRIIRAD, c’est qu’il est difficile de garder le tritium dans un contenant. Comme il est difficilement confinable, il est difficile (voir impossible) pour l’industrie nucléaire de ne pas le laisser s’échapper dans l’eau ou dans l’air car il traverse le béton et le métal.

Alors, comme l’OMS est liée à l’AIEA et que le tritium est difficilement confinable, l’OMS a peut être préféré choisir la référence douteuse et surévaluée de 10 000 Bq/L.

En bref, même s’il existe des valeurs de références institutionnelles concernant le tritium, il n’y a pas d’études scientifiques permettant de dire la dangerosité de doses précises de tritium dans l’eau pour l’être humain. Sans compter, qu’il n’y a aucune normes pour les enfants ou les femmes enceintes alors qu’ils sont plus sensibles à la radioactivité que le reste de la population.

En somme, les valeurs de références institutionnelles du tritium ne nous protègent pas et correspondent à un risque que l’Etat accepte de nous faire prendre pour pouvoir avoir une industrie nucléaire. Ceci sans que notre avis ait été consulté.

 

Est-ce que cette quantité de tritium de 10 Bq/L dans l’eau de Paris et d’Iles de France est dangereuse pour la santé, selon des spécialistes de la santé et du nucléaire?  *

 

10 Bq/l de tritium pour l’eau provenant de l’usine de Choisy-le-Roi est une moyenne. Les mesures en tritium provenant de cette usine peuvent être bien plus élevées. En effet, David Boilley de l’ACRO écrit: « Pour l’eau de l’usine de Choisy-le-Roi :

– En 2016, 20 mesures ont été réalisées avec une valeur moyenne de 5,75 Bq/litre.

– En 2017, 20 mesures ont été réalisées avec une valeur moyenne de 14,25 Bq/litre. » (mail David Boilley le 20 juillet 2019)

Docteur Françoise Boman, écrit: « aucune dose de radioactivité, si faible soit-elle, n’est anodine pour le corps humain. Or, le tritium n’a rien à faire dans l’eau et ne devrait pas y être. Pour ma part, je veux zéro radioélément artificiel dans l’eau que je bois. » (mail Dr. Boman, 6 avril 2018)

Roland Desbordes, de la CRIIRAD, pour répondre, utilise le sievert qui est l’unité permettant d’évaluer l’impact des rayonnements de la radioactivité sur l’homme. Il explique que si une personne boit presque 2 litres d’eau de Paris à 10 Bq/L par jour soit environ 7OO litres par an, ça ferait 0,12 μSv/ an (microsievert par an) soit 0,000 12 mSv (millisievert par an).

Il ajoute: « La Commission internationale de protection radiologique (CIPR) et les directives Euratom, reprises dans le droit français (Code de la Santé Publique), estiment qu’à partir de 0,01 mSv le risque existe. »  (directive Euratom 96/29 et 2013/59) (mail Roland Desbordes 20/07/2019)

Donc, dans la logique de la réglementation française, avec de l’eau du robinet à 10 Bq/L, on n’est pas dans le champ de la radioprotection. C’est cohérent.

A partir du moment où les centrales nucléaires sont autorisées légalement à rejeter de la pollution radioactive (celle de Nogent sur Seine en l’occurrence), on est devant une pollution … légale …..que nous la Criirad, nous estimons non légitime ! » (mail Roland Desbordes 20/07/2019)

 

Est-ce que l’exposition à une radioactivité de faible dose sur un temps prolongé est sans risques, selon les scientifiques ?

 

Ernest Sternglass, physicien, a joué un rôle pionnier, comme scientifique et lanceur d’alerte, dans l’étude des conséquences sanitaires des faibles doses de radioactivité.

De même, Alice Stewart, en 1955, épidémiologiste pionnière, a démontré pour la première fois que la radiographie des femmes enceintes provoque des leucémies infantiles.

John Gofman, chimiste nucléaire, médecin et professeur de biologie cellulaire et moléculaire, a, lui aussi, joué un rôle central dans des travaux ayant conduit la communauté scientifique à prendre en compte les risques de cancer dus aux faibles doses de radiation.

Plus récemment, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a publié sur le site internet de la revue scientifique The Lancet Haematology, une étude validant, entre autre, le fait qu’il n’y a pas de dose radioactive sans risque.

De même, à la fin de la vidéo de l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire
IRSN, il est écrit: « Toute dose présente un risque ».

Docteur F. Boman écrit: « La contamination interne par ingestion d’eau…contaminés par des radionucléides est nocive pour la santé et pour la vie, même à très faibles doses. Les contrôles de la radioactivité ou “qualité radiologique” de l’eau de boisson en France sont insuffisants. »

En somme, il serait une erreur de considérer l’exposition à une faible dose de radioactivité sur un temps prolongé, comme anodine.

Donc, boire 2 litres de l’eau de Paris et d’Iles de France contenant du 10 Bq/L tritium tous les jours sur une longue période, ce n’est pas rien. Tous les risques et dangers que ça comportent ne sont pas connus.

 

 

* NdR : Après avoir confirmé auprès de M. Desbordes une erreur de calcul signalée par un lecteur averti, ce paragraphe a fait l’objet d’une révision par l’auteure.

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