Durant les 15 dernières années, l’impérialisme nord-américain avait négligé l’Amérique Latine car il s’appliquait à dominer, détruire et piller les pays arabes du Moyen Orient afin de contrôler leurs réserves de pétrole et en tirer profit. Mais depuis plusieurs années, il revient en force avec la complicité d’oligarchies nationales qui l’aident à reprendre les rênes du pouvoir. Ainsi les Etats-Unis bénéficient à nouveau des réserves minières, alimentaires et hydriques de l’Amérique Latine. La présidence de Donald Trump est en cela catastrophique à bien des égards.
1. LES COUPS D’ÉTAT «DOUX» SONT MULTIPLIÉS
D’une part, le gouvernement nord-américain n’a jamais cessé de dominer et d’exploiter l’Amérique latine, qu’il continue de considérer son «arrière-cour». Il n’a jamais cessé d’appliquer la déclaration de son 5ème président James Monroe: “L’Amérique pour les Américains”, c’est-à-dire, les Amériques du Nord, Centre et Sud pour les Américains…du Nord.
Depuis 1970, le gouvernement des États-Unis a lancé une nouvelle application de cette déclaration en nommant une commission gouvernementale au service de la CIA (Central Intelligence Agency). Cette commission guide la diplomatie et les interventions en Amérique Centrale et du Sud. Les documents produits par cette commission portent le nom de la ville nord-américaine où réside cette dernière: «Santa Fe», Californie. Nous sommes actuellement dans le 4ème document de Santa Fe, qui se réalise peu à peu comme prévu.
C’est de là que proviennent les coups d’Etat militaires des années 1970 et 80, l’assassinat de présidents, le harcèlement et l’embargo économique contre Cuba, la construction de 34 bases militaires qui entourent tout le continent latino-américain, les assassinats d’une douzaine d’évêques, d’une centaine de prêtres catholiques et de pasteurs protestants, autant de religieuses et des milliers de chrétiennes et chrétiens de l’Église des pauvres.
Avec l’arrivée des gouvernements progressistes dans le sud du continent, a commencé la marche inverse orchestrée par le gouvernement des États-Unis avec la complicité de l’Union européenne. Cela a débuté au Honduras où les États-Unis ont une base militaire sophistiquée qui leur permet de contrôler tous les pays d’Amérique centrale et des Caraïbes. (L’actuelle fraude électorale qui vise à confirmer au pouvoir un président pro-américain est partout dénoncée).
L’interventionnisme a continué au Paraguay, qui ne parvient pas à échapper à un coup d’Etat parlementaire. Puis vinrent les nouveaux gouvernements de l’Argentine et du Brésil. Maintenant, la même chose se passe en Equateur…. sans mentionner, en plus de Cuba, le harcèlement du Venezuela et de la Bolivie. Les récentes manœuvres militaires des États-Unis dans l’Amazonie brésilienne avec leurs gouvernements amis marquent une autre étape dans cette occupation latino-américaine, ce qui renforce « l’Accord du Pacifique » entre les États-Unis, le Mexique, la Colombie, le Pérou et le Chili.
Les perspectives ne sont pas très flatteuses, mais la résistance et l’intégration centraméricaine et latino-américaine continuent d’être actives dans tous les pays.
2. RÉSISTANCES INDIGÈNES, NOIRES ET POPULAIRES
Depuis le début de l’invasion européenne sur le continent en 1492, la résistance des peuples américains n’a pas cessé. Même au sein des États-Unis, malgré leur quasi-extinction forcée, les peuples autochtones continuent de résister et de protester.
Les résistances indigènes
Le continent américain, appelé Abya Yala, a subi le plus grand génocide planétaire des 5 derniers siècles. Au cours des 50 premières années de l’invasion européenne, les deux tiers de sa population, évaluée à l’époque à quelque 100 millions d’habitants, est morte en raison de guerres ou de maladies originaires d’Europe. Aux États-Unis, au Canada et en Argentine les peuples autochtones ont été presque totalement anéantis.
En dépit de ce malheur, ces peuples, aujourd’hui minoritaires, discriminés et marginalisés, continuent d’exister. Plus encore, ils proposent au monde entier une nouvelle société alternative avec une coexistence sociale harmonieuse et en communion avec la nature. Ils sont environ 40 millions, c’est-à-dire un dixième de la population totale. Ils ont leur articulation continentale et ont acquis une certaine autonomie politique, juridique, culturelle, médicale et religieuse.
Ils sont majoritaires au Guatemala et en Bolivie. En Amazonie, il y a beaucoup de peuples en isolement volontaire… Et nous parlons très peu des civilisations qui ont fleuri dans cette immense forêt aussi grande que l’Europe. En Bolivie, ils ont un président autochtone et travaillent à l’interculturalité afin que leurs différents peuples puissent vivre et coexister en respectant leurs identités.
Les peuples autochtones sont un grand espoir non seulement pour l’Amérique latine mais pour toute notre planète. Plus que jamais, un dialogue et un échange entre tous les peuples autochtones de la terre sont nécessaires. Déjà différents pays, tels que la Bolivie et l’Equateur ont intégré dans leurs Constitutions les utopies du ‘Bien Vivre’ indigène. Avec leurs contributions, nous serons en mesure de substituer le capitalisme agonisant qui n’en finit pas de nous tuer avec la faim, les guerres, le pillage et le matérialisme.
Les résistances noires
Avec le trafic de Noirs, quelque 50 millions d’Africains sont arrivés dans les Amériques ; autant sont morts dans leur capture en Afrique et durant les voyages dans « le triangle de la mort » : Afrique, Europe et Amériques! Ils nous ont légué leur musique, devenue hégémonique dans les pays occidentaux.
Malgré le racisme promu par l’éducation mercantiliste, leurs cultures et religions restent vivantes dans leurs différents espaces collectifs. Ils ont activement participé aux luttes libertaires à travers le continent. Ils ont aussi leur articulation continentale et, dans la plupart des pays, ils sont les protagonistes d’une coexistence joyeuse et fraternelle.
Les résistances populaires
Les pauvres de la ville et de la campagne n’ont cessé de protester et de faire face à la domination des Européens et des riches propriétaires terriens de chaque pays. Leurs protestations et soulèvements apportent de nouvelles avancées dans la coexistence nationale et continentale. Ils résistent aux impositions capitalistes qui favorisent la consommation massive de drogues, une technologie qui nous abrutit, un consumérisme hallucinant, une manipulation médiatique constante, des croyances déshumanisantes …
L’Amérique latine est le grand terreau d’une nouvelle humanité … parce que nous avons compris que «si la vie que nous vivons n’est pas digne, la dignité consiste à lutter pour la changer». C’est dans ce contexte que nous continuons de grandir, malgré toutes les limitations, car l’utopie et le mysticisme habitent nos cœurs.
Source : Le Journal de Notre Amérique, février 18, (à paraître)