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En état de mort cérébrale, l’OTAN de tous les dangers maintient son cap

Les sommets de l'OTAN sont un show, un exercice de propagande de masse . L'OTAN a un réel objectif - la domination mondiale à n'importe quel prix - objectif bien trop répréhensible pour être affiché.

Voici maintenant cinq ans qu’Emmanuel Macron, dans l’une de ces déclarations abruptes qui ont fait sa réputation, a déclaré à The Economist, en faisant référence à l’Occident collectif : “Ce que nous vivons actuellement, c’est la mort cérébrale de l’OTAN.” Cette déclaration a choqué les responsables de tout le continent.

“Ce n’est pas mon point de vue”, a répondu très augustement Angela Merkel. “Je ne pense pas qu’il soit utile de porter des jugements aussi tranchés.” Heiko Maas, ministre des Affaires étrangères de la chancelière allemande, a ajouté, très imaginatif : “Je ne pense pas que l’OTAN soit en état de mort cérébrale.”

L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord a célébré son 75e anniversaire la semaine dernière, 32 présidents et premiers ministres se réunissant dans le même auditorium de Washington où les premiers dirigeants, dont 12 à l’époque, ont signé son traité fondateur le 4 avril 1949. Joe Biden a bien entendu présidé les cérémonies d’anniversaire. Dans cette perspective, reconnaissons au dirigeant français la prescience avec laquelle il a diagnostiqué le dysfonctionnement cérébral de l’OTAN. Comme l’a souligné Joe Lauria dans un article de Consortium News à l’issue du sommet de jeudi dernier, il s’agit d’une organisation dont les membres sont collectivement en train de perdre la tête.

Mais il faut bien saisir ce que par cette remarque, Macron a voulu dire et ce qu’il n’a pas voulu dire. Il n’a pas déclaré, comme cela pourrait être facilement mal interprété, que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord était sans objet ou obsolète : c’était la position de Donald Trump, alors en poste depuis trois ans. Macron, en effet, a réagi aux griefs de Trump concernant l’alliance en tant que gouffre budgétaire et à son incapacité, à lui, à orienter les autres membres dans la direction souhaitée par l’imperium, comme l’ont fait tous les présidents américains depuis la création de l’OTAN en tant que première institution militaire du monde atlantique pendant la guerre froide.

Lors de son interview avec The Economist, M. Macron a exprimé son mécontentement face au désordre qui régnait à l’époque dans le nord de la Syrie. Certains lecteurs s’en souviendront peut-être : Trump avait ordonné le retrait des troupes américaines – ordre que diplomates, officiers de l’armée et barbouzes ont rapidement contourné – et la Turquie, membre de l’OTAN, était immédiatement intervenue pour attaquer les milices kurdes basées dans la région.

“Aucune coordination de la prise de décision stratégique entre les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN n’a été mise en place. Pas la moindre”, a déclaré M. Macron à The Economist. “On assiste à une action agressive non coordonnée de la part d’un autre allié de l’OTAN, la Turquie, dans une région où nos intérêts sont en jeu. Il n’y a eu ni planification ni coordination de la part de l’OTAN”.

Et la chute du dirigeant français :

“Il nous faut réévaluer la réalité de ce qu’est l’OTAN à la lumière de l’engagement des Etats-Unis”.

La remarque de Macron sur la “mort cérébrale” n’est donc pas le fruit de la réflexion d’un quelconque pacifiste. L’homme qui préconise aujourd’hui l’envoi de troupes françaises en Ukraine est un militariste convaincu. Ce qui m’intéresse dans les déclarations apparemment audacieuses de Macron, encore et toujours, ce sont les contradictions inhérentes à ces déclarations. Dans le cas présent, il en voulait à Donald Trump de ne pas laisser les Européens prétendre qu’ils avaient leur mot à dire dans la politique d’alliance, tout en profitant de l’occasion pour affirmer son appel, alors nouveau et désormais familier, à l’Europe pour développer son “autonomie stratégique”.

C’est ce genre de choses – le doute, les rancœurs latentes, l’unité qui s’effrite – qui a incité le président Biden à faire du renforcement de l’OTAN une priorité lorsqu’il a pris ses fonctions il y a trois ans et quelques. Lors de l’entretien qu’il a accordé le 5 juillet à George Stephanopoulos, de la chaîne ABC News, il s’est notamment vanté d’être le seul à pouvoir préserver l’unité de l’OTAN.

“La semaine prochaine, la conférence de l’OTAN se tiendra ici, aux États-Unis. Venez écouter. Voyez ce qu’ils disent.”

Le sommet anniversaire a eu lieu et a pris fin. Et deux réalités s’imposent à nous. Les autres dirigeants de l’alliance présents n’ont rien exprimé d’important, pas une seule déclaration digne d’intérêt. Ce fut du réchauffé et du baratin, du début à la fin. Ensuite, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord s’est gentiment réunie – “Together Again”, comme le dit la vieille chanson de Buck Owens – mais il ne fait aucun doute qu’elle est en état de mort cérébrale.

Voilà un sujet effrayant à prendre en considération. Larry Johnson a exprimé son point de vue sur la question qui a accaparé les esprits lors du rassemblement du 9 et 11 juillet. Larry Johnson, désormais commentateur régulier, est un ancien officier de la CIA et a également travaillé au sein du Bureau de lutte contre le terrorisme du Département d’État. Ne vous laissez pas déconcerter par l’imagerie vulgaire, elle est révélatrice de l’état d’esprit latent :

“L’événement politique le plus excitant de l’année est le sommet de l’OTAN qui s’est tenu à Washington. L’ensemble des dirigeants du monde occidental s’y sont rendus, non pas pour discuter de l’avenir de l’OTAN, mais pour voir si Joe Biden survivra aux réunions sans se vider de son contenu ou tomber raide mort. Un peu comme on assiste à une course automobile : on attend l’accident. Rien de tel qu’un accident de voiture pour faire monter l’adrénaline”.

Voyons ce que signifie une rencontre entre membres de l’OTAN. Ce qui les préoccupe, ce ne sont pas les diverses crises dans lesquelles ils ont entraîné le monde au cours des dernières années, mais la question de savoir si l’homme à l’autorité incontestable parviendra à prononcer une allocution cohérente. Nous pouvons rire des démonstrations publiques d’incompétence du président Biden, et il y en a eu quelques-unes, comme toujours, lorsqu’il s’est adressé au sommet et qu’il a donné une conférence de presse par la suite. Mais je n’ai pas dit “drôle” : je disais “effrayant”. Tel est le bilan de l’OTAN après trois ans et demi de mandat de M. Biden en tant que commandant en chef de facto de l’Alliance.

Oui, M. Biden a présenté Volodymyr Zelensky au sommet en tant que “Président Poutine”. Oui, il a confondu son vice-président avec l’inexistant “vice-président Trump”. Mais il serait temps désormais de dépasser le stade de la moquerie. Le moment est certainement venu pour les principaux médias d’arrêter de dire que tout le monde fait des erreurs, car c’est absurde. Ces dernières semaines, Joe Biden a fait figure de triste sire, à la fois tiré de Shakespeare et de Sophocle. Mais le sommet de l’OTAN nous confronte à l’amère réalité : Joe Biden est devenu, avant tout, un personnage dangereux. Comment percevoir sinon un homme qui sombre dans la sénilité tout en dirigeant une alliance militaire démesurément puissante, dont les membres savent comment différer et obéir, mais sont incapables de penser ?

La semaine dernière, j’ai été frappé par le peu de couverture médiatique que les États-Unis ont consacré au sommet. Quelques articles traitaient de la capacité de M. Biden à parvenir au terme de ses interventions – le discours du sommet, la conférence de presse qui l’a suivi – sans trop se tromper. En revanche, peu d’articles ont abordé le contenu du rendez-vous. À mon sens, il a été tacitement suggéré que rien de nouveau n’avait été dit ou décidé au cours de ces sessions des 9 et 11 juillet. Une fois encore, les mêmes propos ont été tenus, et les mêmes propos ne font pas recette dans le monde de l’information.

Intéressons-nous à ce que cela signifie, et à ce qu’implique la perspective d’une répétition générale … Pour illustrer mes propos, je dirai que l’OTAN vient d’engager les post-démocraties occidentales dans une ère de guerre institutionnalisée, de violence mondiale et de chaos, sans qu’aucun plan ne soit envisagé pour y mettre un terme. La même menace d’anéantissement, familière à ceux qui se rappellent la Guerre froide, sera de nouveau de mise. Les dépenses d’armement seront systématiquement prioritaires au détriment du bien-être des sociétés finançant cette prodigalité. La Russie et la Chine seront érigées en ennemis permanents. L’éloignement de l’Occident des pays non occidentaux sera un fait établi. L’État profond, un phénomène transatlantique bien ancré aujourd’hui, s’alliera aux élites libérales autoritaires pour faire appliquer ce régime, et éliminer tous ceux qui le remettent en question ou le contestent.

Ceci dit sans exagération aucune, c’est précisément le projet que les cliques néoconservatrices américaines ont élaboré lorsque l’Union soviétique s’est effondrée en 1991, laissant place à une décennie de triomphalisme américain. C’est ce qu’on retrouve en filigrane dans le discours de M. Biden lors de l’ouverture de la 75e édition de la conférence. Le fait remarquable aujourd’hui est le degré de déni requis de la part des dirigeants de l’OTAN lorsqu’ils professent leur adhésion à cet agenda dans un monde radicalement transformé au cours des trois décennies suivantes.

Après avoir fait l’éloge des “remarquables avancées” des membres européens qui dépensent toujours plus en armement – effrayantes avancées – M. Biden a directement abordé la guerre par procuration que l’alliance mène en Ukraine contre la Fédération de Russie. Parmi ses diverses affirmations :

“L’Ukraine peut et va arrêter Poutine”, “Ne vous y trompez pas, la Russie est en train de perdre cette guerre”, “Nous avons mis en place une coalition mondiale pour soutenir l’Ukraine”. “Une écrasante majorité bipartite américaine comprend que l’OTAN nous protège tous”.

Et puis l’un de mes préférés, un thème récurrent et un pur “Bidenisme” :

“Et Poutine désire plus que tout – plus que tout – l’asservissement de l’Ukraine. Et nous savons que Poutine ne s’arrêtera pas à l’Ukraine”.

Les hauts fonctionnaires qui nous écoutent ont accueilli toutes ces déclarations avec enthousiasme. Aucune d’entre elles n’est en adéquation, même lointaine, avec la réalité. Dans un entretien avec Andrew Napolitano enregistré pour Judging Freedom, réalisé après la clôture du sommet le 11 juillet, John Mearsheimer, spécialiste en politique étrangère, a qualifié le discours de M. Biden de “balivernes, truffées d’affirmations délirantes”. Tout à fait. En lisant la transcription de ces propos, les intervalles d’applaudissements notés entre parenthèses, il m’a semblé que l’OTAN devenait trop soviétique à ce stade. J’ai pensé à ces photos de la Douma russe prises par le magazine Life pendant la guerre froide, lorsque les votes avaient lieu et que toutes les mains se levaient invariablement en signe d’assentiment.

Voilà l’alliance transatlantique telle qu’elle est aujourd’hui. Elle fonctionne sur la base d’élucubrations fantaisistes, et aucun de ses membres ne les remet en cause. Pas un seul média grand public n’a remis en question ces affabulations ridicules, et aucun n’a sérieusement analysé l’objectif ou les politiques de l’OTAN. C’est ce que j’entends par “effrayant”. C’est ce qui rend l’OTAN, telle qu’elle est aujourd’hui, si dangereuse. Son objectif déclaré n’a aucun sens et son objectif non déclaré est tel que mentionné ci-dessus.

Mais voici la diabolique vérité qu’il ne faut pas perdre de vue : M. Biden et tous les participants au sommet savent que l’Ukraine est en train de perdre la guerre, que Moscou n’a pas la moindre intention de s’attaquer à l’Europe et qu’il n’y a pas de “coalition mondiale” pour soutenir l’alliance. Il s’agit là de faits simples et incontestables et avérés. Mais le discours de M. Biden n’était pas destiné aux autres dirigeants présents qui n’ont pas applaudi M. Biden : le véritable auditoire de M. Biden était le public des post-démocraties transatlantiques, et les applaudissements n’étaient que des instructions sur la nécessité d’approuver le discours.

Ces sommets de l’OTAN sont un show, un exercice de propagande de masse mené entièrement au grand jour : je reconnais que je ne saisis pas bien les implications d’une organisation aussi puissante que l’Alliance atlantique opérant de manière aussi creuse et cynique. L’OTAN a bien un objectif, mais ses figures de proue politiques, ses généraux et ses bureaucrates doivent en inventer un pour les besoins du grand public, son objectif réel – la domination mondiale à n’importe quel prix – étant bien trop répréhensible pour être affiché.

Pour ce qui est de la continuité, le sommet anniversaire semble marquer un tournant dans l’alliance orientale, avec l’abandon complet de la prétention de l’OTAN à être une organisation défensive, au profit de postures de plus en plus agressives et provocatrices. Antony Blinken, s’exprimant au cours des débats, a qualifié l’idée de l’adhésion de l’Ukraine à l’alliance d’“inévitable et irréversible”, annonçant au régime de Kiev son cheminement vers “une passerelle bien éclairée”. J’ai interprété ces propos de deux manières. Premièrement, M. Biden et ses cliques politiques font ce qu’ils peuvent, et c’est limité, pour rassurer l’Ukraine en prévision d’une éventuelle victoire de M. Trump en novembre.

Secundo, et plus concrètement, alors que Kiev continue de perdre sur le champ de bataille, l’OTAN a désormais l’intention de signaler que les pourparlers de paix sont hors de question, et que l’alliance s’enfoncera plus profondément dans le marasme, quelle que soit son ampleur à terme. A titre d’exemple, John Helmer, correspondant de longue date et particulièrement fiable à Moscou, qui publie aujourd’hui Dances with Bears, a rapporté la semaine dernière,

Les troupes américaines, britanniques et canadiennes stationnées dans les bases avancées de l’OTAN en Pologne, en Lettonie et en Lituanie sont invitées à se préparer à un déploiement en Ukraine l’année prochaine. Ils sont également avertis qu’ils doivent s’attendre à combattre sous l’artillerie lourde, les missiles, les bombes téléguidées et les frappes de drones des Russes.”

Qu’on note bien quels sont les pays d’où ces troupes seront envoyées sur le front ukrainien. Ce sont tous d’anciens satellites soviétiques qui nourrissent un sentiment de paranoïa anti-russe tout à fait logique, mais mortellement dangereux. Tel est le mode opératoire de l’agression dans le cadre de la guerre à long terme contre la Russie. L’Ukraine s’appuie sur la même animosité anti-russe viscérale par le biais des unités néo-nazies qui dirigent son armée.

“Des nations de la région indo-pacifique sont avec nous aujourd’hui”, a décrété M. Biden au beau milieu de son allocution. “Ils sont là parce qu’ils ont intérêt à ce que nous réussissions et vice versa”.

Je n’aime pas du tout cette remarque. Je l’interprète comme l’aveu à peine voilé d’une vague d’allusions et d’insinuations l’année dernière, selon lesquelles l’OTAN a l’intention d’étendre son champ d’action à l’Asie de l’Est, suivant ainsi les États-Unis dans leur confrontation avec la Chine, qui s’intensifie progressivement.

Comme s’il s’agissait d’une évidence, Jens Stoltenberg, le Secrétaire général sortant de l’OTAN, s’est ensuite lancé dans une attaque tout à fait déplacée contre la Chine, accusée

d’“opprimer son propre peuple”, de “réprimer les voix démocratiques”, de “s’affirmer davantage en mer de Chine méridionale”, de “menacer ses voisins, et Taiwan”,

et ainsi de suite au fil des griefs que Blinken et les cliques politiques du régime de Démocrate privilégient lorsqu’ils s’adressent aux Chinois.

Le rôle de l’OTAN en Asie doit désormais être pris avec le plus grand sérieux. Il s’agit de l’OTAN d’aujourd’hui et de l’OTAN de demain – une OTAN moribonde, une OTAN omniprésente qui n’a de légitimité nulle part. Peu après que M. Stoltenberg se soit acquitté de sa tirade grotesque, M. Biden lui a passé la médaille présidentielle de la liberté autour du cou.


Source : spirit of free speech

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