Greta Thunberg à l’aéroport Eleftherios Venizelos, à Athènes, en Grèce, le 6 octobre 2025 (AFP)

Des ONG appellent à une enquête internationale après les attaques israéliennes contre la Flottille Sumud

Plusieurs organisations internationales de défense des droits humains demandent au Conseil des droits de l’homme de l’ONU de créer une commission d’enquête indépendante sur les attaques israéliennes contre une mission humanitaire maritime à destination de Gaza.

Dans une lettre urgente adressée au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, trois organisations de défense des droits humains – le Centre de Genève pour la Démocratie et les Droits de l’Homme,  le Forum international pour la Justice (Istanbul), et l’Union internationale des Juristes (section de Genève) – ont appelé à l’ouverture immédiate d’une enquête internationale indépendante sur les attaques israéliennes visant la Flottille , qui tentait de livrer de l’aide humanitaire à la population assiégée de Gaza.

Les faits remontent aux 2 et 3 octobre 2025, lorsque des forces navales israéliennes ont intercepté la flottille alors qu’elle naviguait dans les eaux internationales. À bord : plus de 500 volontaires et militants issus de 40 pays, transportant des médicaments et des fournitures humanitaires destinés aux civils et enfants de Gaza, soumis à un blocus ininterrompu depuis 2007.

« Ces attaques constituent des crimes de guerre et des violations graves des droits humains. Elles doivent faire l’objet d’une enquête sérieuse et indépendante », ont affirmé les signataires dans leur lettre.

Une mission humanitaire visée en mer

Selon les organisations, la flottille, surnommée « Sumud » (Fermeté), menait une mission strictement humanitaire, sans armes ni intention politique, dans le but de briser le siège imposé à Gaza depuis 18 ans. Les ONG soulignent que l’assaut israélien s’est produit en pleine mer, hors des eaux territoriales, en violation flagrante du droit international.

Le droit international humanitaire et les conventions des Nations Unies interdisent l’usage de la force contre des civils, y compris en temps de guerre. La Convention sur le droit de la mer garantit la liberté de navigation et interdit toute attaque contre des navires civils dans les eaux internationales. Pour les organisations, l’action militaire israélienne constitue une violation manifeste de ces principes.

Appels à une enquête internationale

Dans leur lettre au Conseil des droits de l’homme, les organisations réclament :

  • La création d’une commission d’enquête internationale indépendante et impartiale pour établir les faits, collecter les preuves et identifier les responsabilités, tant individuelles qu’institutionnelles.
  • La protection juridique des missions humanitaires civiles, avec des mesures concrètes pour prévenir de nouvelles attaques contre des navires ou convois d’aide.
  • Le renvoi des conclusions de l’enquête aux juridictions compétentes, y compris la Cour pénale internationale (CPI) et les tribunaux nationaux habilités à agir en vertu du principe de compétence universelle.

Détentions massives, réactions internationales

L’attaque contre la flottille a provoqué une onde de choc. Selon les autorités israéliennes, 470 personnes ont été arrêtées, et Tel-Aviv prévoit de les expulser vers l’Europe. Près de 200 militants auraient été interrogés, puis transférés au centre de détention de Ketziot, dans le désert du Néguev.

Des manifestations de soutien aux activistes ont éclaté dans plusieurs capitales. Des ONG comme Amnesty International ont condamné l’opération israélienne, et l’ONU a qualifié l’assaut d’« inacceptable ». Des gouvernements ont également appelé à la libération immédiate des détenus et au respect du droit international.

Une catastrophe humanitaire persistante à Gaza

Cette opération marque la première tentative collective de grande ampleur pour rompre le blocus de Gaza par voie maritime. L’enclave palestinienne, où vivent environ 2,4 millions de personnes, subit une crise humanitaire sans précédent.

Depuis octobre 2023, l’offensive militaire israélienne contre Gaza a entraîné la mort de 66 288 personnes et fait 169 165 blessés, selon les dernières estimations, en grande majorité des femmes et des enfants. La famine, conséquence directe du blocus, a déjà coûté la vie à 455 Palestiniens, dont 151 enfants.

Les signataires de la lettre estiment que l’inaction internationale nourrit une culture d’impunité, rendant probables de nouvelles attaques contre des initiatives humanitaires similaires. Ils exhortent le Conseil des droits de l’homme à agir sans délai pour protéger la vie, la dignité et l’accès à l’aide des civils gazaouis.

« Face à l’horreur, le silence n’est pas une option. L’humanité doit prévaloir sur l’impunité ».

Une foule en soutien à la flottille mondiale Sumud dans la zone des arrivées de l’aéroport international d’Athènes, le 6 octobre 2025 (AFP)

Texte de la lettre :

Son Excellence, Président du Conseil des droits de l’homme

Genève, le 6 octobre 2025

Objet : Demande d’établissement d’une Commission internationale d’enquête sur les attaques contre la « Flottille Sumud » – Octobre 2025

Nous, les organisations de défense des droits humains signataires, basées à Genève et à Istanbul, nous nous adressons à vous par la présente lettre urgente afin d’attirer l’attention de votre Conseil sur une série d’attaques systématiques et illégales perpétrées contre les navires de la Flottille Sumud lors de leur tentative de livrer de l’aide humanitaire à la population civile et aux enfants assiégés de Gaza.

I. Faits pertinents

  1. Les 2 et 3 octobre 2025, les navires de la Flottille, en route vers la bande de Gaza, ont été la cible d’attaques flagrantes de la part des forces d’occupation israéliennes. À bord se trouvaient 500 volontaires et militants venus de 44 pays du monde.
  2. La Flottille transportait des médicaments pour les blessés et les malades, ainsi qu’une aide strictement humanitaire destinée aux civils et enfants assiégés de Gaza, dans le cadre d’une mission purement humanitaire.
  3. Ces attaques répétées et systématiques constituent des crimes de guerre et des violations graves des droits humains qui nécessitent une enquête approfondie et la mise en œuvre de mécanismes onusien et établir les responsabilités.

II. Fondements juridiques

  • Le droit international des droits de l’homme, qui interdit le recours à la force contre des civils ou des militants pacifiques, et impose aux États l’obligation de protéger les civils, même en période de conflit.
  • Le droit international humanitaire (Conventions de Genève et Protocoles additionnels), qui exige la protection des civils et de l’aide humanitaire, et interdit les blocus ayant pour effet de provoquer la famine des populations civiles ou de leur refuser les biens de première nécessité.
  • La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), qui garantit la liberté de navigation en haute mer et interdit les attaques contre les navires civils dans les eaux internationales.
  • Les principes de la responsabilité internationale, qui imposent la responsabilité des individus et des États pour les violations graves des droits de l’homme et les crimes de guerre.

III. Exigences et recommandations

Au vu de ce qui précède, nous appelons respectueusement le Conseil des droits de l’homme à prendre les mesures suivantes :

  1. Établir une Commission d’enquête indépendante et impartiale Pour enquêter sur les incidents survenus à l’encontre des navires de la Flottille en septembre et octobre 2025, établir les faits et les preuves, et déterminer les responsabilités juridiques individuelles et institutionnelles.
  2. Protéger les civils et l’aide humanitaire
    Adopter une résolution ou une recommandation appelant à une protection juridique immédiate de la flottille et de l’aide humanitaire qu’elle transporte, et à l’arrêt de toute attaque contre les civils ou les navires civils engagés dans des opérations de secours.
  3. Transmettre les conclusions aux autorités judiciaires compétentes
    Notamment à la Cour pénale internationale et aux juridictions nationales appliquant le principe de compétence universelle, afin d’engager des poursuites contre les auteurs de ces violations.

IV. Le risque d’une impunité persistante

  • Ignorer ces incidents entretient une culture d’impunité, augmentant ainsi le risque d’attaques similaires contre des initiatives pacifiques et humanitaires.
  • De plus, l’inaction de la communauté internationale équivaut à un abandon des millions de civils de Gaza, soumis à un blocus prolongé et à des conditions humanitaires catastrophiques.

Nous espérons sincèrement que le Conseil des droits de l’homme prendra cette demande avec le plus grand sérieux et agira sans délai pour mettre en œuvre ces propositions juridiques, en défense du droit à la vie, à la dignité et à l’assistance humanitaire.

Meilleures Salutations

Signataires

Centre de Genève pour la Démocratie et les Droits de l’Homme – Genève
Forum international pour la Justice – Istanbul
Union internationale des Juristes – Genève

Contact : ijugeneva@bluewin.ch / 079 246 57 03 / 022 760 02 04


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