Cristiano Zanin Martins : « C’est une guerre juridique contre Lula à des fins politiques »

L’ancien président, qui dénonce les mesures du gouvernement putschiste, a été condamné le 12 juillet à neuf ans de prison. Son avocat, Cristiano Zanin Martins, dénonce une sentence inique.

 

Le juge Sergio Moro, en charge de l’enquête « Lava Jato », qui a révélé la corruption au sein de l’entreprise pétrolière Petrobras, a condamné, le 12 juillet, l’ancien président Lula à neuf ans de prison pour « crime de corruption ». Vous dénoncez le caractère politique de cette sentence. Pour quelles raisons ?

 

Depuis l’an dernier, date à laquelle les investigations contre le président Lula ont débuté, nous avons démontré qu’il était victime d’actes illégaux et arbitraires. Sa vie personnelle et familiale a été jetée en pâture. Or, tout repose sur des suppositions. Nous assistons à une guerre juridique à des fins politiques. Le président Lula a été condamné mais sans la moindre preuve de sa culpabilité.

 

Est-il possible de condamner une personne sans aucune preuve ?

 

Non, c’est absolument incompatible avec la Constitution fédérale et les traités internationaux que le Brésil a signés. Vous ne pouvez écarter la présomption d’innocence à laquelle tout citoyen a droit que s’il y a des preuves indiscutables de la responsabilité d’un crime. Le président Lula a été condamné pour crime de corruption et blanchiment d’argent sans aucune preuve d’enrichissement personnel et de passe-droits en vue de favoriser l’entreprise citée dans l’enquête.

 

Comment le juge Moro peut-il dès lors justifier la sentence de condamnation de Lula ?

 

Pour justifier cette condamnation, le juge Moro s’est appuyé sur le témoignage d’une personne qui se trouve derrière les barreaux et qui a changé de version durant le procès. C’est la seule voix accusatrice contre le président Lula. Ce témoin a reconnu durant l’audience qu’il était en train de négocier une remise de peine.

 

Vous critiquez le manque d’impartialité du juge Moro. Sur quoi repose ce reproche ?

 

Le juge Moro n’est pas impartial. Il n’en a même pas la prétention. Il n’a cessé de porter des accusations contre Lula, alors que cette responsabilité relève des procureurs. Il a participé à des rassemblements contre le président qui peuvent s’apparenter à un abus d’autorité. Il est allé jusqu’à divulguer à des radios et des télévisions brésiliennes des conversations privées. Il a été de plusieurs événements avec des hommes politiques de partis antagoniques à celui dont Lula est le leader. Il est donc loin d’être équidistant. Les médias le présentent même comme l’opposant de Lula.

 

Tout n’est pourtant pas critiquable dans l’enquête sur le scandale « Lava Jato » ?

 

Ce procès a eu le mérite d’épurer un foyer de corruption qui impliquait des agents de Petrobras mais également des personnalités politiques. Mais cette ambition a été détournée. Elle est devenue une persécution politique contre ceux qui sont considérés comme des ennemis des autorités qui ont pris la tête de l’opération « Lava Jato ». Le président Lula est désormais le principal ennemi politique. Le procès « Lava Jato » a abusé du prestige dont il bénéficiait dans la société brésilienne, en cherchant à légitimer des actes illégaux contre le président. Sa défense a démontré que ce procès n’avait pas lieu d’être, et encore moins sa condamnation.

 

Le président Lula a décidé de faire appel de la sentence du 12 juillet. La procédure, qui pourrait durer près d’un an, pourrait-elle constituer un frein à sa candidature à l’élection présidentielle de 2018 ?

 

Nous avons présenté un premier recours au propre juge Moro. Nous avons également émis un autre recours contre la saisie du patrimoine du président Lula sur demande du juge Moro. Je rappelle que ce dernier n’avait aucun élément à sa disposition pour appliquer cette décision, qui a des conséquences extrêmement graves.

Il s’agit d’imposer au président Lula une asphyxie économique qui porte préjudice à sa subsistance, à celle de sa famille et à l’exercice du droit à sa défense. Cet étranglement économique est également une persécution politique. Elle suppose que l’ennemi n’a pas le droit à la défense, alors que les dispositions juridiques fédérales le garantissent.

J’insiste, la sentence de premier degré est appliquée comme s’il s’agissait d’une sentence définitive. Il s’agit de freiner la trajectoire politique du président Lula, qui se montre disposé à concourir à la présidentielle de 2018.

 

Est-ce également pour cela que vous avez déposé un recours auprès du Comité des droits de l’homme de l’ONU ?

 

En juillet 2016, nous avons porté à la connaissance du Comité des droits de l’homme des Nations unies un rapport démontrant que le système de recours interne n’était pas en mesure d’assurer les garanties fondamentales du président Lula. Le rapport a été reçu positivement. La condamnation du 12 juillet sans preuve de culpabilité ainsi que la saisie des biens de Lula renforcent les dénonciations que nous avions déjà soulignées il y a un an.

 

Source : Journal l’Humanité


 

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