John Catalinotto*, travailleur au World Trade Center, nous parle des attentats, il y a dix ans, de leurs conséquences, des doutes relatifs à la version officielle de l’administration Bush et de la montée en puissance du mouvement anti-guerre. Interview réalisée par Rüdiger Göbel.
Le 11 septembre est considéré comme une date de rupture dans l’histoire récente. Où étiez-vous au matin du 11 septembre 2001, au moment où des avions ont foncé sur les tours du World Trade Center ?
Quand et comment avez-vous appris qu’il y avait eu un attentat ?
À 9 heures, juste comme je quittais ma maison, mon beau-frère m’a appelé. Il m’a dit : « Une chance que tu sois encore chez toi. Tu travailles bien au World Trade Center ?
– Oui, pourquoi ? quelqu’un l’a fait sauter? » ai-je répondu. En 1993 il y avait déjà eu une explosion à la tour 1 du WTC, ce qui m’avait fait regretter que la compagnie d'assurance y transfère ses bureaux, même si de là-haut on avait une vue splendide sur le port de New-York.
J’ai d’abord cru qu’il y avait eu un accident provoqué par un petit avion. J’ai même appelé tout de suite à mon travail, pour demander si je devais venir, mais personne n’a décroché. Pendant que j’appelais mes proches pour leur dire que j’allais bien, j’ai entendu à la radio qu’un deuxième avion s’était encastré dans la tour 2 et un troisième dans le Pentagone. J’ai compris immédiatement que cela voulait dire : il va y avoir une guerre.
Avez-vous perdu des parents ou amis ?
La quasi-totalité des 3000 morts soit se trouvaient dans les étages situés au-dessus du point d’impact, soit étaient des passagers des avions ou appartenaient aux forces de police et aux pompiers en service dans les tours lorsqu’elles se sont effondrées. Environ 1800 personnes étaient employées par mon assurance. À peu près la moitié étaient déjà dans le bureau au moment des faits. Treize sont morts ; j’en connaissais personnellement une seule, à qui je remettais des données tous les trois mois. L’un de mes collègues les plus proches était dehors et regardait l’incendie en haut de la tour 1, quand le deuxième avion a percuté la tour 2. À côté de lui une femme a été touchée par la roue détachée d'un avion et tuée sur le coup. Mon collègue a dû enjamber son corps pour quitter les lieux.
Quelle a été votre première réaction ? Qui avez-vous rendu responsable de cet événement ?
Dès que j’ai compris qu’il ne s’agissait pas d’un accident, j’ai tout de suite compris que l’administration Bush utiliserait les attentats pour justifier une guerre. J’ai pris contact avec les camarades qui travaillent à notre hebdomadaire et j’ai insisté pour que nous nous rencontrions immédiatement afin de changer le contenu du prochain numéro et de lancer une attaque politique contre le gouvernement. Peu importait le responsable direct. Il y avait déjà eu des attentats contre le navire de guerre US « le Cole », alors qu’il était à l’ancre près d’Aden, au Yémen, et auparavant contre l’ambassade américaine au Kenya. La plupart des gens pensaient que les auteurs de ces attentats étaient les mêmes que ceux du WTC. Il me semblait inévitable que l’administration US utilise le traumatisme que cet attentat avait causé à la population pour mobiliser le pays en faveur d’une guerre. En outre j’avais peur qu’il y ait d’autres attentats. Être capable d’une analyse politique des faits ne suffisait pas, loin de là, à m’immuniser contre les sentiments qui régnaient alors à New-York.
Au fil des ans, un « mouvement pour la vérité » s’est constitué ; il met en question la version officielle que New York et Washington donnent des attentats et parle d’un accord des services secrets états-uniens, voire même d’un « inside job » pur et simple. Quel écho ces thèses trouvent-elles aux USA et que doit-on en penser?
Se méfier des sphères dominantes et des grands groupes de médias états-uniens est une attitude parfaitement saine. Ils mentent en permanence. Ils sont également capables des pires crimes, comme ils l’ont prouvé tout récemment encore en Irak, Afghanistan et Libye. C’est pourquoi les déclarations officielles ont éveillé des doutes chez beaucoup de progressistes, car elles ne fournissaient pas de réponses satisfaisantes à leurs questions.
En outre il a toujours existé des relations complexes entre l’impérialisme US et des groupes tels qu’Al-Qaïda. Washington les a employés et armés contre l’Union soviétique en Afghanistan. En Irak, Al-Qaïda a provoqué des conflits interreligieux et rendu difficile une unification des mouvements de résistance irakiens. De plus, faire d’ Al-Qaïda « l’ennemi public n°1 » a été utile à une époque où les impérialistes n’avaient plus de rival sérieux, comme naguère l’Union soviétique. Mais ces groupes font aussi concurrence aux USA et ce sont des forces états-uniennes qui ont tout récemment exécuté le chef d’Al-Qaïda. Si l’on prend en compte tous ces facteurs, on pourrait penser qu’au sein des services secrets états-uniens quelqu’un/certains auraient pu savoir que l’un de ces groupes commettrait un attentat aux USA. Et n’ont peut-être rien fait pour l’empêcher.
Ici de plus en plus de gens mettent en doute la version officielle. Personnellement je ne pense pas qu’il s’agisse d’une quelconque opération sophistiquée, impliquant de larges pans de la machine des services secrets officiels. Plus que de dévoiler un complot, je juge important d'examiner les conséquences du « 11 septembre » et l’utilisation que les dirigeants ont faite des attentats pour servir leurs plans guerriers. J’ai lu récemment dans Junge Welt une citation prêtant à un ex-ambassadeur états-unien en Allemagne ces propos : « Je ne sais pas ce qu’ils auraient fait sans le 11 septembre. Ou bien rien, ou on aurait cherché un autre prétexte. » Les attentats ont offert aux impérialistes l’occasion de conquérir ces parties du monde encore relativement indépendantes. Plus important encore que le 11 septembre était la chute de l’Union soviétique. Quel que soit le jugement que l’on porte sur l’URSS, sa simple existence a renforcé la position des anciens pays coloniaux.
De fait, l’administration Bush a immédiatement profité du 11 septembre pour lancer une guerre contre l’Afghanistan et s’est également juré d’en faire une contre l’Irak. Des livres écrits par des membres du cabinet Bush le révèlent. George W. Bush, Colin Powell, d’autres encore, ont proféré cent fois des mensonges face à l’opinion publique pour justifier la guerre. On en a des preuves. Pourtant la découverte de ce complot n’a pas conduit à punir la bande à Bush, ni même empêché Obama de recommencer en Libye.
Il faut mobiliser contre la guerre et pas seulement dévoiler des complots si nous voulons entraîner les gens dans la lutte.
Dans la foulée, le Président George W. Bush a déclaré la « guerre sans limites contre le terrorisme » et lancé en octobre 2001 les premières attaques contre l’Afghanistan. Cette « vengeance » semblait voulue et approuvée par une grande majorité d’Etats-uniens. Y avait-il déjà des voix, des groupes, qui refusaient la guerre et faisaient le lien entre les attentats et la politique étrangère des USA ?
La contestation a été le fait d’une alliance entre des gens de l’aile gauche, anti-impérialiste du mouvement progressiste, des pacifistes et des gens liés à des Églises progressistes. Il y a eu des veilles contre la guerre à New-York. Fin septembre 7000 personnes ont manifesté à Washington contre la guerre en Afghanistan et l’utilisation des attentats pour militariser le pays.
Cela a dû être difficile de s’opposer à la guerre contre le terrorisme, il y a dix ans?
Il y a même eu des proches de victimes du 11 septembre qui ont exprimé leur désaccord quand le gouvernement a utilisé ces victimes pour justifier sa guerre.
Au Sénat il a été impossible de trouver des opposants, comme cela s’était encore produit en 1964 quand les sénateurs Ernest Gruening de l’Alaska, et Wayne Morse de l’ Orégon avaient voté contre la résolution du Golfe du Tonkin qui ouvrait la voie à la guerre au Vietnam. Seuls quelques membres isolés du Congrès se sont opposés, par exemple la Californienne Barbara Lee et la Géorgienne Cynthia McKinney. McKinney vient d’achever une tournée dans plus de vingt villes d’Amérique du Nord. Devant un public comptant en général plusieurs centaines de personnes elle a appelé à se mobiliser contre la guerre en Libye.
Sous l’administration Bush, on a enfermé des détenus dans des cages à Guantanamo et on a fait enlevé et torturer des musulmans dits « terroristes présumés ». Comment la population états-unienne a-t-elle réagi à cette montée de la brutalité?
Comme à peu près tout ce qu’a fait l’administration Bush en huit ans, l’organisation du camp de Guantanamo a été un crime. Mais cela n’a pas dérangé la grande majorité de ceux qui détiennent le pouvoir et l’argent dans ce pays. Et donc les médias n’ont répercuté que la position du gouvernement à ce sujet. Il n’y a pas eu non plus de mouvement massif contre Guantanamo. Seules quelques organisations de juristes progressistes, comme le « Committee for Constitutional Rights » (Comité pour la défense des droits constitutionnels) ont pris la défense des détenus de Guantanamo et porté plainte contre le gouvernement pour illégalité. Elles ont ainsi obtenu la libération de quelques prisonniers et l’interdiction de faire juger les autres par des tribunaux militaires. Obama avait promis de fermer Guantanamo, mais le camp est toujours en fonctionnement.
Il me semble que le mouvement contre la guerre s’est renforcé surtout à cause de la montée de la résistance irakienne. Plus il mourait de GI en Irak, plus les guerres de Bush devenaient impopulaires.
Les manifestations les plus importantes ont eu lieu avant le début de la guerre, en janvier -février 2003. Et puis c’est retombé durant les premiers mois d’occupation. Mais il y a encore eu une énorme manifestation à Washington D.C. en septembre 2005, peu après l’ouragan Katrina à la Nouvelle-Orléans. Cette manifestation répondait au succès de la résistance irakienne, qui avait donné à beaucoup l’impression qu’on s’acheminait vers une situation à la vietnamienne. Lors de la guerre au Vietnam l’héroïsme des combattants vietnamiens pour la libération du pays, le grand nombre de victimes chez les GI et la crainte d’être appelés a conduit à une résistance massive au sein des universités et dans toute la jeunesse en général. Ce qui a eu pour effet de provoquer une niveau de résistance plus stratégique chez les gradés, qui a commencé à menacer la cohésion de l’armée. Et parallèlement on vivait la grande époque du mouvement des Noirs pour la liberté et l’égalité, qui a eu un effet d’entraînement sur toutes les autres luttes.
Au printemps 2006, des conflits interreligieux qui faisaient suite à l’attentat à la bombe – suspect – contre la Mosquée d’Or de Samarra ont affaibli la résistance irakienne. Et il y a eu peu de victimes chez les GI. Aussi bien aux USA que chez les soldats le mouvement contre la guerre s’est affaibli, bien que les sondages montrent qu’un pourcentage croissant de la population y est opposé.
C’est le slogan « Change » qui a fait gagner à Barak Obama les élections de 2008. Il avait annoncé le retrait total des troupes d’Afghanistan et la fermeture de Guantanamo. Il n’aura fait ni l’un ni l’autre à l’expiration de son mandat. Il a été mis fin à la « guerre contre le terrorisme» en ce sens que l’administration Obama a cessé d’employer ce terme, mais parallèlement le nombre des troupes US engagées en Afghanistan a énormément augmenté et une « guerre des drones » a été lancée contre le Pakistan. Avez-vous partagé l’espoir que beaucoup ont mis en Obama et pensé que sa victoire électorale signerait le début d’un véritable changement dans la politique étrangère des USA?
À la fin du mandat de Bush des millions de gens, aux USA et ailleurs, ont été soulagés, parce qu’ils espéraient que l’impérialisme états-unien en finirait désormais avec les guerres et occupations. Aux USA beaucoup espéraient qu’au moins l’administration démocrate de Barack Hussein Obama limiterait les attaques contre les droits et le niveau de vie des travailleurs ainsi que les droits civils de la population afro-américaine. Les immigrés entrés illégalement – plus de 11 millions – espéraient qu’Obama mettrait fin à la précarité de leur statut.
Aux USA, dont l’histoire est tellement marquée par l’esclavage et la terreur exercée pour soumettre les gens d’origine africaine, et face au racisme toujours virulent, l’élection d’un homme politique fils d’un Noir et portant un prénom musulman a sûrement eu un effet psychologique et politique considérable. La population noire a voté à 95% pour Obama, les Latinos à 70%. La grande majorité des travailleurs syndiqués a aussi voté pour lui .
Mais parallèlement Obama a reçu beaucoup plus de subsides de Wall Street que son challenger républicain John Mc Cain. Obama était un candidat acceptable pour les classes dirigeantes. Des analystes appartenant à cette classe – Zbigniew Brzezinski, David Gergen – considéraient Obama, en raison de son travail au Sénat et de son action politique à Chicago comme un politicien expérimenté, capable d’amener républicains et démocrates à collaborer et à conclure des compromis. Ils souhaitaient un front politique commun pour sortir de la crise économique dont les effets dévastateurs étaient apparus dans les dernières années Bush.
En Europe aussi les classes dirigeantes étaient contentes de voir partir Bush, car son administration – surtout au cours des quatre premières années – avait imposé son agenda avec arrogance, au détriment des intérêts impérialistes européens. Les grands groupes médiatiques européens ont donné d’Obama une image extrêmement positive. La grande manifestation à Berlin avant son élection a même rassemblé beaucoup plus de gens que ses réunions électorales aux USA. Peu après son élection, le Comité des Nobel lui a décerné le Prix Nobel de la paix, bien qu’il n’ait absolument rien fait pour la paix où que ce soit.
Après l’élection d’Obama, j’ai été content moi aussi du rejet infligé au programme politique de Bush, et plus encore de voir un Afro-Américain devenir Président des USA, mais je n’attendais pas de changements importants dans la politique étrangère agressive de l’impérialisme états-unien. Même si Obama avait été le politicien progressiste et pacifiste que beaucoup voulaient voir en lui, il n’aurait été qu’un individu isolé, solidement tenu en laisse par les forces gigantesques des classes dirigeantes. Les banques, les firmes pétrolières, le complexe militaro-industriel avaient tout pouvoir pour réduire les marges de manœuvre de n’importe quel politicien. C’était plus vrai encore pour Obama qui, à la différence des politiciens issus de la classe dirigeante – Franklin Roosevelt dans les années 30 et John F. Kennedy – ne disposait d’aucun appareil politique ou de liens personnels avec la classe dirigeante, qui lui aurait fourni un appui pour mener une politique un peu plus indépendante. Et bien qu’il n’ait jamais été un leader des droits civiques de la population afro-américaine, le simple fait d’être un Afro-Américain a suffi à en faire la cible des pires forces racistes et réactionnaires.
Le Pentagone a bien montré que la guerre était toujours son affaire lorsque l’administration Obama a voulu soumettre à examen sa politique afghane, à l’été et l’automne 2009. Au beau milieu de ce processus, le général Stanley McChrystal a défié Obama en déclarant publiquement qu’il était absolument nécessaire de « renforcer les troupes » en Afghanistan. Cela a complètement sapé l’autorité d’Obama. Le Président a accepté l’envoi des renforts massifs exigés – 100 000 soldats, soit trois fois les troupes envoyées par Bush. En contrepartie, il n’a reçu que l’engagement du Pentagone de commencer le retrait des troupes en juillet 2011. Quand les troupes se retireront-elles tout à fat d’Irak et d’Afghanistan ? uniquement quand l’occupation échouera et que la charge deviendra intolérable pour les finances publiques. Ce n’est toujours pas le cas. Entre temps l’administration Obama a élargi son intervention au Pakistan et lancé des attaques de drones au Yémen et en Somalie.
Et qu’en est-il des contre-pouvoirs dans votre pays ?
Après quelques années de stagnation, le mouvement anti-guerre connaît un renouveau. Le 9 avril dernier des dizaines de milliers de gens ont manifesté à New-York contre les guerres en Afghanistan et Irak ainsi que l’agression de l’OTAN contre la Libye. Les revendications de nombreux mouvements contre les restrictions budgétaires, dans des dizaines de villes et d’États fédéraux, incluaient la fin des guerres ; des groupes de jeunes et de travailleurs qui s’inspiraient des contestations de masse en Espagne et en Grèce et y puisaient du courage ont érigé des villages de tentes.
Il est difficile de dire quelque chose d’intelligent sur la politique étrangère actuelle des USA sans évoquer la crise économique du capitalisme. Cette crise a mis Obama, depuis sa prise de fonctions, dans l’impossibilité de jouer le rôle qui lui revenait, c’est à dire celui d’un politicien habile capable d’amener républicains et démocrates à des compromis. En 2009 le chômage a connu une montée rapide, officiellement un doublement à 10%. Mais en réalité, en comptant les partiels, il y a plus de 17% de chômeurs, soit 25 à 30 millions. Des millions d’entre eux sont des chômeurs de longue durée, sans aucun espoir de trouver un job. La situation des Afro-Américains et des Latinos est particulièrement difficile, le taux de chômage chez eux est près du double de la moyenne ; il est encore plus élevé chez les jeunes.
Même si aux élections il n’y a pas un grand écart entre démocrates et républicains, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’opposition massive au bellicisme, au racisme anti-émigrés, aux coupes dans les budgets sociaux et aux campagnes antisyndicales, loin de là. Ces luttes menées par la base sont rarement répercutées dans les médias états-uniens et encore moins à l’étranger, mais depuis le début de la crise financière en 2008 c’est tout le pays qui est en ébullition.
La première réaction importante a eu lieu dans le Wisconsin, épicentre, depuis février 2011, de la résistance « d’en bas ». Le gouverneur Scott, avec l’appui de la nouvelle droite et du Tea Party avait alors tenté de faire passer une loi qui prévoyait des coupes dans les prestations sociales et de surcroît ôtait aux travailleurs du public le droit de négocier des conventions collectives. Mis le dos au mur, les syndicats de services du Wisconsin ont bien dû se défendre. Parallèlement des étudiants en lutte contre les restrictions budgétaires dans les universités ont pris l’initiative d’occuper le Capitole de l’État, à Madison.
Les quatre mois de mobilisation des travailleurs du Wisconsin ont été l’un des plus magnifiques témoignages, depuis des décennies, de la ténacité, de la force et des capacités d’organisation des syndicats. Cette lutte a déclenché une vague de solidarité nationale et internationale et accru le soutien de l’opinion publique aux syndicats. Les révoltes du monde arabe s’y sont invitées, lorsque des travailleurs et étudiants de Madison ont arboré des T-shirts portant l’inscription « Walk like an Egyptian » (En marche comme un Égyptien). Les dix-huit jours d’occupation du Capitole et les manifestations massives ont culminé le 12 mars : 185 000 manifestants ont encerclé le Capitole à Madison. Malheureusement, depuis, les choses se sont calmées dans le Wisconsin et les syndicats s’efforcent uniquement d’obtenir un vote en faveur de la destitution du gouverneur afin qu’il n’achève pas sa mandature. Ces évènements ont toutefois montré ce qu’il était possible de faire, même dans les conditions très défavorables auxquelles vont être confrontés les travailleurs dans les années qui viennent. Comme je suis un optimiste, je compte voir émerger un mouvement de masse avec une base très large, réunissant les travailleurs organisés et les communautés où ils vivent, et qui ne vise pas qu’à défendre les travailleurs et les pauvres, mais aussi à faire échouer la tentative des grandes puissances impérialistes de recoloniser le monde.
Que ferez-vous ce 11 septembre ?
Pour le dixième anniversaire du « 11 septembre » je serai avec d’autres militants et habitants de New-York juste à l’endroit où se trouvait le World Trade Center. Nous contrerons une manifestation raciste projetée ce jour-là par des islamophobes. En commun avec la vaste alliance « Emergency Mobilization Against Racism, War and Anti-Muslim Bigotry » formée en 2010 et qui a organisé le 11 septembre dernier une contre-manifestation du même type rassemblant quelques dizaines de milliers de gens, nous espérons étouffer une manifestation qui sera sûrement beaucoup moins importante mais qui se donne pour but de faire naître la haine et la peur pour empêcher la construction d’un centre islamique dans le voisinage de Ground Zero.
Nos protestations s’adressent aussi à la tentative de l’administration US et des responsables locaux d’exploiter les sentiments de ceux qui ont à déplorer des pertes humaines le 11 septembre 2001 pour justifier de nouvelles guerres d’agression. Dans la phase actuelle de la crise économique, le plus important est de s’opposer aux forces qui veulent rendre les immigrés et les musulmans responsables des coupes croissantes dans les programmes sociaux, la croissance du chômage et la poursuite des guerres.
* Anti-impérialiste engagé depuis la crise des missiles de Cuba en octobre 1962, John Catalinotto a milité de 1967 à 1971 comme civil au sein de l’American Servicemen’s Union contre la guerre au Vietnam. Depuis 1982 il est rédacteur en chef de l’hebdomadaire Workers World. Membre de l’International Action Centers (IAC), fondé en 1991 par Ramsey Clark, militant des droits humains et ex-Ministre de la Justice; depuis 1999 porte-parole de l’IAC dans les conférences internationales. Il a collaboré de 2001 à 2004 à l’Answer Coalition, fondée en 2001 pour contrer la propagande belliciste après le 11 septembre. Il a apporté son soutien à la coordination internationale des opposants à la guerre en Irak.
John Catalinotto a publié deux livres : Metal of Dishonor sur l’uranium appauvri et Hidden Agenda: The U.S.-NATO Takeover of Yugoslavia. À l’heure actuelle il enseigne les mathématiques à la City University de New York.
Source : jungewelt.de
Traduction : Investig'Action