Tapis rouge pour le Premier ministre fasciste d’Inde afin de l’enrôler dans la nouvelle guerre froide des Etats-Unis contre la Chine

Le gouvernement US tente de diviser le bloc des BRICS et d’enrôler l’Inde pour sa nouvelle guerre froide contre la Chine. Biden ne se soucie pas du fait que le Premier ministre d’extrême droite Modi est étroitement lié à des groupes fascistes suprémacistes hindous qui oppriment violemment les minorités.

 

Le Premier ministre indien d’extrême droite Narendra Modi a effectué un voyage historique aux États-Unis en juin dernier.

Alors que les États-Unis cherchent à enrôler l’Inde pour leur nouvelle guerre froide contre la Chine, le président Joe Biden a déroulé le proverbial tapis rouge à Modi, vantant une “nouvelle ère” destinée à “renforcer notre partenariat pour les décennies à venir”.

Les deux dirigeants ont publié une déclaration commune critiquant implicitement la Chine et la Russie.

Selon les précisions de Reuters, “Washington veut que Delhi soit un contrepoids stratégique à la Chine”. Les deux dirigeants ont par ailleurs signé “des accords sur la défense et le commerce visant à contrer l’influence mondiale de la Chine”.

Le journal britannique The Guardian a déclaré qu’il existait un “consensus bipartisan” aux États-Unis selon lequel le gouvernement indien d’extrême droite est un “pivot” dans les efforts déployés par Washington pour affaiblir et déstabiliser Pékin.

Avec le Japon et l’Australie, l’Inde est déjà membre du dialogue quadrilatéral sur la sécurité, un bloc militaire anti-chinois dirigé par les États-Unis.

Le Quad est souvent surnommé l’ “OTAN indo-pacifique” ou “OTAN asiatique” et vise explicitement à encercler la Chine.

Biden et Modi ont eu une rencontre amicale lors du sommet des dirigeants du Quad à Hiroshima en mai dernier.

Les liens étroits de Modi avec les groupes nationalistes hindous d’extrême droite

En Inde, Modi est connu pour ses liens avec des groupes politiques extrémistes hindous suprémacistes.

En 2002, l’État indien du Gujarat a été le théâtre d’un pogrom massif au cours duquel des centaines de musulmans ont été tués. À l’époque, Modi était ministre en chef de cet État. Il a supervisé les violences.

Pendant le mandat de Modi à la tête du Gujarat, les manuels scolaires financés par l’État glorifiaient le fascisme, en présents aux enfants “Hitler, le surhomme” et enseignant les “réalisations internes du nazisme”.

Modi est également un membre de longue date du mouvement paramilitaire fasciste RSS, dont les premiers dirigeants ont fait l’éloge d’Adolf Hitler. Sur le modèle du Troisième Reich, ils ont cherché à modeler un “Hindustan” religieusement pur, diabolisant les musulmans de la même manière que l’Allemagne nazie diabolisait les juifs.

Dans son livre « We, or Our Nationhood Defined », publié en 1939, l’idéologue du RSS, MS Golwalkar, écrivait : “Pour préserver la pureté de sa nation et de sa culture, l’Allemagne a choqué le monde en purgeant le pays des races sémitiques – les Juifs. La fierté nationale s’est manifestée ici dans toute sa splendeur. L’Allemagne a également montré combien il est pratiquement impossible pour des races et des cultures, dont les différences remontent à la racine, d’être assimilées dans un ensemble uni ; c’est une bonne leçon que nous, les hindous, devrions apprendre et dont nous devrions profiter”.

Le BJP, le parti nationaliste hindou d’extrême droite de Modi, est le bras politique du RSS.

Les législateurs du BJP ont prononcé des discours appelant ouvertement à la “reconversion” forcée des musulmans et des chrétiens d’Asie du Sud. Ils se livrent aussi régulièrement à des incitations contre les Dalits et d’autres Indiens de basse caste.

Dans l’Inde d’aujourd’hui, les militants de gauche sont régulièrement attaqués. Les médias progressistes qui critiquent les politiques économiques néolibérales et anti-ouvrières du gouvernement font l’objet de descentes de police. Les domiciles de journalistes sont saccagés par la police.

Les États-Unis veulent utiliser l’Inde pour diviser les BRICS

Malgré ses liens étroits avec des groupes extrémistes violents, Modi a bénéficié d’un soutien bipartisan à Washington, tant chez les républicains que chez les démocrates.

Lors de son voyage à Washington en juin dernier, Modi a prononcé un discours devant une session conjointe du Congrès. Les politiciens des deux bords l’ont ovationné.

Alors que Biden accueillait Modi le fasciste à Washington, il qualifiait en même temps le président chinois Xi Jinping de “dictateur”.

À l’époque où Barack Obama était à la Maison-Blanche, le New York Times avait noté que le président démocrate entretenait également une « amitié » étroite avec Modi.

La relation de Donald Trump avec le Premier ministre indien était encore plus intime. Les deux leaders d’extrême droite se sont symboliquement tenu la main lors d’un rassemblement “Howdy, Modi” au Texas.

En 2021, l’ancien directeur de la CIA de Trump devenu secrétaire d’État, Mike Pompeo, s’est vanté que Washington avait tenté d’affaiblir les BRICS en soutenant Modi (ainsi que le dirigeant d’extrême droite brésilien, Jair Bolsonaro).

“Vous vous souvenez des BRICS ? Eh bien, grâce à Jair Bolsonaro et Narendra Modi, le B et le I comprennent désormais que le C et le R sont des menaces pour leurs peuples”, avait tweeté Pompeo, triomphant.

L’objectif des États-Unis est très clair : enrôler l’Inde pour diviser les BRICS et isoler la Chine et la Russie.

Modi n’a rien à voir avec la création des BRICS. Le bloc a été fondé en 2009 sous son prédécesseur, le Premier ministre Manmohan Singh, membre du Congrès national indien, principal rival du BJP, le parti d’extrême droite de Modi.

Les tensions sont devenues de plus en plus évidentes. L’ancien diplomate indien MK Bhadrakumar a écrit en janvier dernier que “l’Inde a le blues des BRICS”.

Le régime d’extrême droite de Modi en “Inde se sent mal à l’aise à l’idée que le centre de gravité des BRICS est sur le point de se déplacer davantage vers la gauche”, a-t-il expliqué.

Bhadrakumar a noté que Modi est un fervent “acolyte de l’ordre fondé sur des règles” dirigé par les États-Unis, c’est-à-dire le système impérialiste dirigé par les États-Unis.

Ces efforts semblent porter leurs fruits, du moins en partie.

Mauvais signe pour le processus d’intégration asiatique, l’Inde était censée accueillir un sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) en juillet, mais Modi a annulé la réunion en personne et l’a réduite à un simple appel virtuel.

La presse indienne a noté que cette “décision a surpris beaucoup de monde, car les dirigeants de tous les pays de l’OCS étaient censés assister physiquement au sommet à New Delhi”.

La Chine, la Russie et le Pakistan sont membres de l’OCS. L’Iran a récemment adhéré à l’OCS.

En annulant le sommet en personne, Modi a indiqué que l’OCS n’était pas une priorité, tandis que son voyage à Washington était clairement en tête de son agenda.

Cela dit, l’Inde n’est pas totalement soumise aux États-Unis.

L’Inde entretient toujours des relations économiques étroites avec la Russie, en grande partie parce que Moscou lui vend du pétrole à prix réduit, ainsi que des engrais bon marché. La Russie est également le principal fournisseur d’armes de l’armée indienne.

L’amitié historique de Delhi avec Moscou remonte à l’époque de l’Union soviétique, lorsque le parti de gauche, le Congrès national indien, rejetait la première guerre froide de Washington et dirigeait le mouvement des non-alignés.

Le gouvernement de Modi n’a pas entièrement renié l’historique politique étrangère non alignée de l’Inde. Mais il a rapproché Delhi de Washington et contrarie de plus en plus la Chine.

Le plan américain de “friendshoring” est confronté à une rude bataille

Les États-Unis sont déjà le premier partenaire commercial de l’Inde. Washington fait désormais pression sur ses entreprises pour qu’elles délocalisent leurs activités de la Chine vers l’Inde.

Certaines entreprises pourraient le faire, mais jusqu’à présent, elles ne sont pas nombreuses à s’être lancées. Pour l’instant, le “friendshoring” ou « délocalisation chez les amis » semble surtout être un mot à la mode dans les médias.

Remplacer des usines de plusieurs millions de dollars est beaucoup plus facile à dire qu’à faire. La Chine applique également un contrôle des capitaux, ce qui signifie que les investisseurs occidentaux ne peuvent pas simplement retirer tous leurs capitaux du pays sur un coup de tête.

En outre, la réalité est que la main-d’œuvre chinoise est très qualifiée et donc très difficile à remplacer.

L’Inde offre un marché gigantesque ; sa population vient de dépasser celle de la Chine, ce qui en fait le pays le plus peuplé de la planète.

Mais si l’Inde compte aujourd’hui plus d’habitants, son économie ne représente qu’une fraction de celle de la Chine.

La Chine possède la plus grande économie du monde, mesurée en parité de pouvoir d’achat (PPA).

Selon les données de la Banque mondiale, le PIB par habitant (PPA) de la Chine en 2021 s’élevait à 19 338 dollars, alors que celui de l’Inde n’était que de 7 242 dollars.

L’absurde comparaison Modi-Deng : La “diplomatie triangulaire” kissingerienne ne fonctionnera pas cette fois-ci

Lorsqu’il est arrivé aux États-Unis, Modi a été immédiatement accueilli par un large éventail de la classe dirigeante. Non seulement des dirigeants politiques, mais aussi une équipe hétéroclite d’oligarques comme le PDG d’Apple Tim Cook et Elon Musk, le milliardaire antigouvernemental subventionné par le gouvernement.

Le gestionnaire de fonds spéculatifs Ray Dalio a rencontré le dirigeant indien et a écrit avec enthousiasme : “Je suis heureux de pouvoir aider le Premier ministre Modi, car c’est un homme dont l’heure est venue, tout comme l’heure de l’Inde est venue. Lui et l’Inde sont dans une position analogue à celle de Deng Xiaoping et de la Chine au début des années 1980”.

Cette comparaison est absurde. Modi et Deng pourraient difficilement être plus différents. Et le conflit entre la Chine et l’Inde n’a rien à voir avec la division sino-soviétique.

Les réformes de Deng sont intervenues après que la Chine a connu une révolution et mis en œuvre une vaste réforme agraire et foncière – ce dont l’Inde a désespérément besoin.

L’incroyable développement de la Chine n’a été possible que grâce à cette étape fondamentale, qui lui a permis de passer à une nouvelle phase d’industrialisation massive, de développer les forces productives nécessaires pour fournir la base matérielle de l’avancement du socialisme.

L’Inde n’a jamais connu de révolution. Sa réforme agraire après l’indépendance a été très inégale et incomplète – et bon nombre des acquis progressistes de Nehru ont depuis été annulés par des décennies de néolibéralisme.

La Chine a toujours mis en œuvre des plans quinquennaux. Cette planification partielle est à l’origine de sa merveilleuse croissance économique.

Modi n’a pas de plan de développement économique cohérent. Jusqu’à présent, il n’a fait que poursuivre un modèle néolibéral qui a échoué.

Certaines entreprises US augmenteront probablement leur “friendshoring” en Inde. Mais les travailleurs indiens finiront simplement par être de plus en plus exploités par le capital étranger, avec peu de gains sur le long terme. Pour inverser la vapeur, il faudrait que l’Inde mène une politique industrielle concertée et dirigée par l’État, qu’elle utilise les investissements étrangers de manière stratégique, qu’elle profite des transferts de technologie et des coentreprises pour développer ses propres industries locales naissantes avec des politiques protectionnistes pour les empêcher d’être dévorées par les concurrents occidentaux.

Mais ce n’est pas la tendance avec Modi. D’ailleurs, son programme phare, « Make in India », a été un échec total.

Modi a lancé l’initiative en 2014, immédiatement après son arrivée au pouvoir.

Il a affirmé avec audace que l’Inde deviendrait une superpuissance manufacturière, promettant que l’industrie manufacturière atteindrait 25 % du PIB et créerait 100 millions d’emplois.

Au lieu de cela, l’Inde a perdu 24 millions d’emplois dans le secteur manufacturier et sa part dans le PIB est tombée de 17 % à 14 %, à partir de 2021.

La filiale indienne de Bloomberg a déclaré en 2021 : “Make in India n’a atteint aucun des objectifs que le programme s’était fixés. Au contraire, tous les indicateurs se sont dégradés, qu’il s’agisse de la part de l’industrie manufacturière dans l’économie ou du nombre d’emplois générés dans l’industrie manufacturière”.

“Malgré toute sa rhétorique sur la relance de l’industrie manufacturière indienne pour concurrencer la Chine, Modi a fait bien pire que son prédécesseur Manmohan Singh”, ajoute le site web.

En outre, le BJP d’extrême droite de Modi est aux antipodes du parti communiste chinois. Il n’a pas de plan de développement économique cohérent.

Au contraire, le BJP et son mouvement fasciste RSS se concentrent sur la promotion de l’Hindutva et mènent une guerre culturelle (souvent violente) contre les musulmans et les Dalits.

Enfin, l’économie US est plus faible aujourd’hui qu’elle ne l’était à l’époque, et elle est confrontée à un grave déclin.

En 1980, les États-Unis représentaient un peu plus de 20 % de l’économie mondiale (avec un PIB mesuré en PPA). À la même époque, l’économie indienne était légèrement plus importante que celle de la Chine, avec 2,77 % contre 2,26 %, selon les données du FMI.

En 2023, la donne a complètement changé. La Chine représente désormais 18,92 % de l’économie mondiale, plus que les États-Unis (15,39 %) et nettement plus que l’Inde (7,47 %).

Comparer Modi à Deng, c’est méconnaître les différences considérables entre les conditions matérielles de la Chine, de l’Inde et des États-Unis, à l’époque et aujourd’hui.

La réalité est que, cette fois-ci, Washington n’a tout simplement pas le pouvoir nécessaire pour répéter sa “diplomatie triangulaire” kissingerienne. L’hégémonie US est en phase terminale de déclin.

L’Inde pourrait, en fin de compte, le reconnaître, couvrir ses risques et revenir à une politique étrangère non alignée. Mais Washington fait tout ce qu’il peut pour l’en empêcher.

 

Source: Geopolitical Economy
Traduit de l’anglais par GL pour Investig’Action

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