(AFP)

Julian Assange : La farce des assurances diplomatiques étatsuniennes

Alors que Karen Sharpe, nous éclairait, dans une interview du 27 mars 2024 sur les garanties diplomatiques fragiles des États-Unis, ce présent article de Craig Murray offre une analyse critique des stratégies juridiques employées et des risques encourus par Assange dans son engagement pour le droit universel à l'information.

Les États-Unis ont maintenant, à première vue, produit la note diplomatique donnant les deux assurances requises par la Haute Cour pour permettre la poursuite de l’extradition de Julian Assange. L’assurance que Julian Assange sera autorisé à invoquer le premier amendement pour sa défense est un sophisme d’une faiblesse flagrante.

Vous pouvez lire mon analyse de l’arrêt de la Haute Cour sur le droit d’appel d’Assange ici.

Permettez-moi d’abandonner l’assurance contre la peine de mort. Je suis sûr qu’elle sera acceptée par la Cour. Les États-Unis n’ont pas besoin d’exécuter Julian, ils peuvent l’incarcérer à vie dans un minuscule tombeau de béton, sous une privation sensorielle extrême, comme un terrible avertissement mort-vivant à tout journaliste qui pourrait révéler leurs crimes.

Si cela devait s’avérer gênant, il pourrait à tout moment le même sort qu’Epstein ou Seth Rich. N’oubliez pas qu’il s’agit d’un gouvernement qui a comploté pour le kidnapper et/ou l’assassiner, comme cela a été plaidé et n’a pas été nié devant le tribunal.

L’assurance requise sur la protection du premier amendement est mal comprise par presque tous ceux qui en font état, et la note diplomatique américaine cherche à tirer parti de cette confusion.

La Haute Cour a estimé que le premier amendement offre les mêmes protections que l’article X de la Convention européenne des droits de l’homme et que, par conséquent, les droits de M. Assange au titre de la Convention seront protégés s’il est autorisé à invoquer le premier amendement comme moyen de défense devant un tribunal américain. La Cour n’a pas demandé l’assurance qu’un tel plaidoyer aboutirait. L’article X de la CEDH est lui-même truffé d’exceptions autoritaires, notamment en matière de sécurité nationale.

L’assurance sur laquelle la Haute Cour a insisté est qu’un tel plaidoyer ne pourrait pas être rejeté en raison de la nationalité d’Assange. Cela contredirait la disposition distincte de la CEDH contre la discrimination fondée sur la nationalité. La note diplomatique américaine n’a pas véritablement abordé ce point, mais elle prétend le faire.

Dans une déclaration sous serment adressée au tribunal britannique, le procureur américain avait déjà déclaré qu’Assange pouvait être privé de la protection du premier amendement parce qu’il était un ressortissant étranger ayant agi à l’étranger. Mike Pompeo l’avait également déclaré officiellement. Le principe est clairement énoncé par la Cour suprême dans l’affaire USAID contre Open Society :

LE “CHERCHER À” CRUCIAL

Les États-Unis n’ont donc tout simplement pas pu affirmer que Julian Assange pourra invoquer le premier amendement, car le juge, suivant le précédent de la Cour suprême, va très certainement le rejeter pour des raisons de sa nationalité.

La note diplomatique indique donc que Julian Assange peut chercher à soulever une défense fondée sur le premier amendement sans interdiction pour des raisons de nationalité. Cela signifie précisément que ses avocats sont autorisés à dire :

“Mon client souhaite invoquer la protection du premier amendement pour sa liberté d’expression”

C’est ce que signifie “chercher à invoquer”.

Le juge répondra immédiatement :

“Le premier amendement ne s’applique pas à votre client en tant que ressortissant étranger agissant à l’étranger, comme l’a établi la Cour suprême des États-Unis dans l’affaire USAid contre Open Society”.

Cette réponse est conforme à la phrase utilisée dans la note diplomatique américaine : “Une décision sur l’applicabilité du premier amendement est entièrement du ressort des tribunaux américains”.

Le 20 mai, une audience aura lieu pour déterminer si cette non-assurance est suffisante pour protéger Julian Assange de toute discrimination fondée sur la nationalité et permettre la poursuite de l’extradition.

En tant que personne raisonnable, vous pensez sans doute qu’il est impossible qu’un tel tour de passe-passe juridique puisse être accepté. Mais si c’est le cas, cher lecteur, vous n’avez aucune idée de la corruption des pigeons déguisés en juges britanniques.

Qui aurait pu penser qu’ils auraient pu décider que le traité entre le Royaume-Uni et les États-Unis a force de loi pour extrader Julian Assange, mais que l’article IV du traité excluant les délits politiques n’a étrangement pas de force de loi ?

Qui aurait cru qu’ils auraient pu décider que l’espionnage par le gouvernement américain des entretiens juridiques avocat/client de Julian Assange et la saisie de ses documents juridiques n’invalidaient pas la procédure ?

Qui aurait cru qu’ils auraient pu juger que le complot du gouvernement américain visant à l’enlever ou à l’assassiner n’est pas pertinent, car s’il est extradé, le gouvernement américain n’aura plus besoin de l’enlever ou de l’assassiner ?

Je pourrais continuer ainsi. Je serais très surpris si les juges de la Haute Cour, à la suite de l’audience du 20 mai, ne statuaient pas que le droit de demander à ne pas être discriminé pour des raisons de nationalité (et de se voir opposer un refus) constitue une protection suffisante contre la discrimination fondée sur la nationalité.

Ils sont vraiment sans vergogne.


Source : Craig Murray

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