Des élections parlementaires ont eu lieu en Ukraine en octobre dernier. Le parti au pouvoir, réputé pro-russe, est sorti vainqueur avec 30% des voix tandis que le parti de Ioulia Timochenko, soutenu par l’Occident, est arrivé deuxième avec 25%. Les grands médias ont unanimement défendu la cause de cette dernière, dénonçant son incarcération « politique », accusant le parti au pouvoir de fraudes et soulignant, de manière plus générale, le manque de respect des droits de l’homme en Ukraine. En revanche, ils sont restés muets au sujet de la percée de l’extrême droite (10% des voix) et des liens qui unissent celle-ci au parti de Timochenko. De même, ils n’ont pratiquement pas parlé des objectifs réels – économiques et géostratégiques – de l’Occident dans la région, bien qu’il s’agisse d’un élément indispensable à une bonne compréhension des vrais enjeux des élections.
Nous avons cherché à traiter l'ensemble des thèmes évoqués ci-dessus dans notre dossier. Celui-ci comprend un reportage sur le déroulement des élections, une interview de Jean-Marie Chauvier sur l'extrême droite et deux articles de fond (un sur Timochenko, l'autre sur les intérêts occidentaux). Nous avons également republié des extraits du livre de Michel Collon, Monopoly. L’OTAN à la conquête du monde, paru en 2000 et toujours d'actualité, ainsi qu'un article du site AgoraVox sur la question de la démocratie.
Articles
Sur l'extrême droite et le mouvement fasciste :
« Ukraine : les néofascistes entrent au Parlement », une interview de Jean-Marie Chauvier, spécialiste de l'Ukraine et de la Russie. Jean-Marie Chauvier revient sur la percée du parti d'extrême droite Svoboda (allié de Timochenko) qui a obtenu plus de 10% des voix et 37 sièges dans le silence médiatique le plus complet.
« Qui est vraiment Ioulia Timochenko ? », un article de Simon de Beer. Egérie de la Révolution orange, Timochenko est présentée en Occident comme une parfaite démocrate. Une réputation largement trompeuse qui dissimule ses liens avec l'extrême droite, l'impérialisme US et le monde corrompu des affaires.
Sur les accusations de fraudes et la démocratie en Ukraine :
« Les observateurs observés. Enquête auprès des arbitres électoraux en Ukraine », un reportage de Louise Magne. Louise Magne a accompagné les observateurs internationaux chargés de surveiller les élections ukrainiennes. Sa conclusion : un grand battage médiatique pour pas grand-chose.
« Elections législatives en Ukraine : premiers résultats : la démocratie ne se porte pas si mal merci », un article de Méfrange (AgoraVox). Analyse de la couverture médiatique pré-électorale en Ukraine par le site AgoraVox.
Sur les intérêts économiques et géostratégiques de l'Occident en Ukraine :
- « Les enjeux de la bataille pour l'Ukraine », un article de Simon de Beer. Elargir l'OTAN, affaiblir la Russie, s'accaparer un marché trop fermé : tels sont les vrais objectifs des USA en Ukraine d'après les archives délivrées par Wikileaks.
« L'Ukraine, voie de pénétration vers Moscou », extraits du livre de Michel Collon, Monopoly. L’OTAN à la conquête du monde (2000). Il y a douze ans, Michel Collon analysait les objectifs des USA en Ukraine et revenait sur la vraie nature de l'OTAN, bras armés de multinationales. Une analyse toujours d'actualité.
Retrouvez aussi nos précédents articles sur le mouvement fasciste ukrainien et la Révolution orange.
Quelques informations sur les élections d'octobre 2012
Le élections qui ont eu lieu le 28 octobre 2012 étaient les élections parlementaires. 450 députés ont été élus en un seul tour, la moitié par scrutin uninominal majoritaire, l'autre moitié par scrutin proportionnel.
Un minimum de 5% des voix est nécessaire pour être représenté au Parlement ukrainien (Rada suprême). Cinq partis ont franchi ce seuil en 2012 :
Le Parti des Régions : 30%, 187 sièges. Formation de l'actuel président Viktor Ianoukovitch, réputé pro-russe en Occident. Sa base électorale se trouve essentiellement dans les régions de l’Est et du Sud, largement russophones.
Batkivchtchina : 25,54%, 105 sièges. Coalition de l’opposition dont la figure majeure est Ioulia Timochenko, égérie de la Révolution orange, actuellement en prison. Batkivchtchina a sa base électorale dans les régions de l’Ouest et du Nord de l'Ukraine, plus tournées vers l'Occident et berceau du nationalisme ukrainien.
UDAR : 13,96%, 39 sièges. Parti d’opposition de droite récemment créé par le boxeur Vitali Klitchko.
Le Parti communiste : 13,18%, 32 sièges. Parti dirigé par Piotr Simonenko, réputé de tradition soviétique, dont la remontée s’observe surtout dans les fiefs ouvriers traditionnels de l’Est, du Sud et de Crimée. Une analyse de son succès électoral a été faite sur le blog Solidarité Intenationale du PCF.
Svoboda : 10,44%, 37 sièges. Cette formation d'extrême droite n'est autre que l’ancien Parti social-national réputé néonazi, antisémite et russophobe. Elle est dirigée par Oleh Tiahnibok, autre figure marquante de la Révolution orange.
Les résultats définitifs sont disponibles sur le site de la Commission électorale (en ukrainien).
Commentaire
Une alliance avait été prévue avant les élections par les trois partis d'opposition pro-occidentaux : Batkivchina, UDAR et Svoboda. Cependant, ceux-ci n'obtiennent ensemble que 181 sièges sur 450.
Le Parti communiste est généralement qualifié d'« allié » du Parti des Régions, mais il s'agit d'une qualification abusive reprise à l'opposition. Ce parti a assuré qu'il agirait au sein du Parlement comme une force indépendante (cf. l'article du PCF).
Aussi ces élections pourraient-elles ne pas déboucher sur la formation d'une majorité parlementaire.
Quoi qu'il en soit, on remarque que c'est encore une fois le camp réputé « pro-russe » qui remporte les élections. Il s'agit d'une constante depuis désormais près de 20 ans, y compris à l'occasion de scrutins reconnus comme valables et démocratiques par la « Communauté internationale » (notamment en 2006 et 2010). La seule exception est la Révolution orange de 2004, au terme de laquelle le candidat pro-occidental Viktor Iouchtchenko avait, avec le soutien ouvert des USA, été élu président.